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Baudelaire écrit dans les Fleurs du mal : « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or ». Dans quelle mesure ce vers s’applique-t-il à ce recueil?

Charles baudelaire, l’esthétique de la boue, exercice pour la classe de première..

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Exercices bac français Baudelaire Les Fleurs du Mal /parcours Alchimie poétique : la boue et l'or-Evaluez votre niveau

Exercices bac français baudelaire les fleurs du mal /parcours alchimie poétique : la boue et l'or-evaluez votre niveau, testez vos connaissances.

Exercices bac français Baudelaire Les Fleurs du Mal /parcours Alchimie poétique : la boue et l'or-Evaluez votre niveau, testez vos connaissances, entraînez-vous

Dissertation

Parcours bac poésie , dans quelle mesure la citation de l’épilogue s’applique au recueil des fleurs du mal de quelle nature est cet « or » poétique quels sont les enjeux esthétiques, introduction.

Accroche (lettre de Baudelaire sur le projet d’épilogue)

Analyse du sujet (citation provenant de l’épilogue, explication et analyse amenant à dégager une problématique)

Problématique (de l’analyse précédente découle un questionnement et une problématique : la poésie de Baudelaire relève-t-elle d’une esthétique condamnable de la laideur ?)

Plan (trois parties) :

Les Fleurs du mal, œuvre alchimique

Nature de l’or poétique

Enjeux esthétiques d’une telle conception

Peut-on donc affirmer que la poésie de Baudelaire est celle de l’odieux, de l’ignoble, en un mot de la boue ? Et si oui, faut-il voir dans l’ouvrage de Baudelaire un amoncellement fangeux moralement condamnable qui ne trouverait aucune justification sinon celle d’une boue qui ferait l'objet d’une transformation ? Nous verrons dans quelle mesure la citation de l’épilogue s’applique au recueil des Fleurs du mal, puis nous montrerons de quelle nature est cet « or » poétique, et enfin quels sont les enjeux esthétiques d’une telle conception de la poésie.

Plan possible pour la dissertation

Développement, i - les fleurs du mal, œuvre alchimique .

Toute cette première partie tend à justifier, expliquer, éclairer la citation « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or » qui fait du recueil une œuvre alchimique (c’est-à-dire une transformation de la boue en or)

Première sous-partie : Baudelaire, le poète de la boue

Cette sous-partie démontre que le thème de la boue est omniprésent dans le recueil de Baudelaire.

Deuxième sous-partie : Transformation de la boue en or

La fange — métaphore de la laideur physique et morale — fait l’objet d’une transformation poétique semblable à celle qu’opère le soleil sur les choses (référence au poème « Le Soleil »).

II - L’or poétique ou l’unité du dualisme

La deuxième partie montre que les thèmes de la boue et de l’or sont indissociables et que la poésie non seulement exprime mais permet d’échapper à cette boue.

Première sous-partie : Correspondance

Cette sous-partie montre comment sont liés les thèmes de la boue et de l’or. Elle insiste sur la notion de « correspondance » et la « double postulation » qui révèle à la fois un désir d’or et de boue.

Deuxième sous-partie : L’art pour échapper à l’ici-bas

Le poète veut cependant échapper à une boue qui est rendue supportable par l’art lequel, comme chez les poètes de la Pléiade, enchante le réel.

III - Modernité poétique de Baudelaire : vers une nouvelle définition de l’art

On a montré que l'œuvre de Baudelaire s’inscrivait dans une tradition poétique : le poète chante une réalité que d’aucuns jugent odieuse, mais c’est pour mieux l’enchanter. Il n’a de toute façon pas le choix et réinvente la poésie.

Première sous-partie : La muse malade de Baudelaire

La poésie de Baudelaire souligne l’écart entre un passé glorieux et un présent maladif (c’est le mal du siècle). En d’autres termes, le poète ne saurait échapper à la boue.

Deuxième sous-partie : le désenchantement comme sujet poétique

Loin d’être une poésie déplorant un état de fait, Baudelaire fixe de nouveaux objectifs et prône une poésie capable de tout dire tout en se faisant le précurseur de la poésie moderne.

1re partie : Les Fleurs du mal, œuvre alchimique ? L'or poétique - Vers une nouvelle définition de l'art, la modernité poétique

1re partie : les fleurs du mal, œuvre alchimique .

Baudelaire, le poète de la boue

Dans le projet d’épilogue, deux vers avant le vers « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or », Baudelaire se compare à « un parfait chimiste » lequel effectue donc cette opération de transformation de la boue en or. À l’autre bout du recueil, dès l’adresse « Au lecteur », cette opération de transmutation était — quoique pour des raisons très différentes — déjà évoquée dans la troisième strophe à travers les termes « Satan Trismégiste », « riche métal », « ce savant chimiste ». On trouve même une mention du « chemin bourbeux » emprunté par le poète et nous-même, l ‘« hypocrite lecteur ». La notion de « chimie » poétique voire d’ « alchimie » (que l’on songe à « Alchimie de la douleur ») traverse donc le recueil de part en part, du début à la fin. Le thème de la boue n’est pas moins omniprésent dans le recueil des Fleurs du mal. Qu’on pense au « Sept Vieillards » (« Dans la neige et la boue il allait s’empêtrant »), au « Vin des chiffonniers » (« Au cœur d’un vieux faubourg, labyrinthe fangeux » ) ou encore à « Brumes et pluies » (« Ô fin d’automne, hivers, printemps trempés de boue,/ Endormeuses saisons ! Je vous aime vous loue. »).

Ce ne sont que quelques exemples et l’on pourrait les multiplier (on retrouve le terme dans « Le Cygne », « Le Monstre »...). La boue est manifestement un thème que l’on ne peut manquer dans la poésie de Baudelaire. C’est que littéralement, dans le Paris du XIXe siècle, on marche dans la boue. On en a la preuve chez Baudelaire lui-même dans les Petits poèmes en prose :

« — Mon cher, vous connaissez ma terreur des chevaux et des voitures. Tout à l’heure, comme je traversais le boulevard, en grande hâte, et que je sautillais dans la boue, à travers ce chaos mouvant où la mort arrive au galop de tous les côtés à la fois, mon auréole, dans un mouvement brusque, a glissé de ma tête dans la fange du macadam. Je n’ai pas eu le courage de la ramasser. »

Mais est-ce à dire que c’est là un simple thème traité par le poète en raison d’une familiarité certes bien ennuyeuse mais inévitable pour le Parisien du Second Empire ? En fait, on a vu et on verra que cette boue était l’objet d’une transmutation, d’une transformation poétique faisant de la laideur quelque chose de beau.

Transformation de la boue en or

Nous l’avons dit, la boue est une métaphore désignant aussi bien ce qui est sale physiquement (le Paris du XIXe siècle) que moralement (ceux qui habitent cette ville). Ainsi, la boue a partie liée avec le mal, avec la misère sociale dans « Le Vin des Chiffonniers » par exemple ou encore ans les deux « Crépuscules » où l’on croise « catins » et « escrocs » (« Le Crépuscule du soir ») et où s’expriment les « rêves malfaisants », « la lésine » (« Le Crépuscule du matin »). En somme, Paris devient chez Baudelaire le lieu allégorique du théâtre du mal dans la section des Tableaux parisiens ou du Vin. Ici, le temps, la vieillesse et la Mort sont omniprésents.

Il appartient toutefois au poète de sublimer cette matière, ce que montre le poème « Le Soleil » dans lequel l’astre transforme le réel :

Quand, ainsi qu’un poète, il descend dans les villes, Il ennoblit le sort des choses les plus viles, Et s'introduit en roi, sans bruit et sans valets, Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais.

Mais précisément, comme le soleil, la mission poétique consiste à faire la lumière sur ce qui est caché, à le montrer, à le révéler en somme, à non seulement l’exposer poétiquement, mais par la même occasion à l’embellir. Le laid devient donc beau comme dans « Une Charogne ». Plus précisément, c’est la représentation du laid qui devient belle. À qui s’interrogerait sur un tel choix esthétique, il conviendra de montrer qu’il y a là une dualité (comme le suggère la section Spleen et Idéal). Le poète ne saurait choisir entre la boue et l’or. Ce ne peut être l’un ou l’autre, mais l’un et l’autre. La femme n‘est-elle pas à la fois muse et vampire (« Les Métamorphoses du vampire »), le poète n’est-il pas à la fois béni et maudit (voir, par exemple « Bénédiction »), etc. ?

2e partie : L’or poétique ou l’unité du dualisme

Correspondance

L'impossibilité de ce choix se trouve dès le poème « Correspondances », dans lequel Baudelaire exprime l’idée d’un lien entre les contraires : « Dans une ténébreuse et profonde unité, / Vaste comme la nuit et comme la clarté, / Les parfums, les couleurs et les sons se répondent ». Dans ces vers, les opposés (la nuit et la clarté) sont donc indissociables (le poète parle bien d’unité). On pourrait multiplier les exemples qui soulignent l'entrelacs de la boue et de l’or, du beau et du laid. Que l’on songe aux nombreux oxymores tels que la « superbe carcasse » dans « Une Charogne », à leur coordination (« [...] noire et pourtant lumineuse » dans « Un Fantôme »), ou encore au titre qui fait de la beauté une fleur du mal. Le projet poétique est inscrit dès le titre dans l’alliance de ce nom (« fleurs » connoté méliorativement) et de ce complément (« du mal » connoté péjorativement). etc. Dans « Une charogne », on a une comparaison du cadavre avec une fleur ! Hypotypose de l'objet pour qu’on voie la charogne. Le poète nous met la mort devant les yeux. Excès de réalisme ? Non, rappel philosophique.

Non seulement les contraires sont indissociables, mais ils « se répondent ». Ils sont même constitutifs de la nature humaine. Rappelons-nous de la désormais célèbre double postulation dans Mon cœur mis à nu : « Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan. L'invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade ; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre. » Ainsi, la nature humaine est complexe. Un Guy de Maupassant ne dira pas autre chose (voir par exemple la nouvelle « Sur l’eau ») et Charcot ou Freud ne sont pas si loin.

Mais on aurait tort de croire, comme le journaliste du Figaro, que le poète se complait dans une fange immorale. D’une part, on l’a vu, le sujet est inéluctable, c’est une réalité topographique, mais surtout il s’inscrit dans un objectif poétique de transformation qui renvoie à un désir d’ailleurs, autre grand thème baudelairien. Le poème « Mœsta et errabunda » ne dit pas autre chose : « Emporte-moi, wagon ! enlève-moi frégate ! / Loin ! loin ! ici la boue est faite de nos pleurs ! » Baudelaire y évoque au vers 2 « l’immonde cité » qui dit assez par ailleurs la condamnation morale dont elle fait l’objet. Désir d’un ailleurs qui s’exprime tout au long des Fleurs du mal et conclut d’ailleurs le recueil dans « Le Voyage ».

L’art pour échapper à l’ici-bas

En effet, dans « Mœsta et errabunda », l’enjeu consiste bien à quitter cette boue. L’homme qui a les deux pieds dans la boue perçoit, dans un mouvement vertical, les cieux et, de la noirceur, contemple la lumière : « Tel le vieux vagabond, piétinant dans la boue, / Rêve, le nez en l’air, de brillants paradis ; » (« Le Voyage ») Somme toute, on a ici l’idée très platonicienne d’une transcendance perçue à travers le rêve.

Ainsi, les poèmes des Fleurs font valoir l’irrémédiable distance qu’il y a entre le monde et un ailleurs qui s’exprime dans un platonisme évident (remarquer le mot « Idée » avec une majuscule) dans « L’Irrémédiable » :

« Une Idée, une Forme, un Être Parti de l’azur et tombé Dans un Styx bourbeux et plombé Où nul œil du Ciel ne pénètre »

Mais ce qui prédomine alors, c’est l’idée d’une chute de l’humanité tombée dans le péché (la boue) d’où le vocabulaire très religieux qui abonde dans le recueil. Dès lors, seul l’art permet de rendre supportable la laideur du monde et le spleen qu’elle engendre. En somme, l’art, le beau rendent la boue supportable, ils rendent « L’univers moins hideux et les instants moins lourds ». (« Hymne à la beauté »)

On a vu que la boue et l’or étaient indissociables (voir encore à ce sujet « Hymne à la Beauté »). L’un ne va pas sans l’autre. Si la boue du réel est transformée en or de la poésie, y a-t-il là quelque chose de nouveau ? Eh bien, les poètes du XVIe ne faisaient pas autre chose. L’écriture a souvent eu pour objectif de transformer ce qui est douloureux en chant poétique. Que l’on songe au lyrisme d’Orphée ou à Joachim du Bellay qui dans Les Regrets (sonnet XII) écrit :

Je ne chante, Magny, je pleure mes ennuis, Ou, pour le dire mieux, en pleurant je les chante, Si bien qu’en les chantant, souvent je les enchante : Voilà pourquoi, Magny, je chante jours et nuits.

En somme, l'œuvre de Baudelaire s’inscrit dans une tradition poétique que l’on pourrait qualifier de classique, et ce sera l’un des premiers poncifs de la grande réhabilitation de Baudelaire notamment lors du cinquantième anniversaire de sa mort : Baudelaire est un classique. Seulement, ce serait aller un peu vite en besogne et omettre ce qui fait la spécificité de son œuvre.

3e partie : Modernité poétique de Baudelaire : vers une nouvelle définition de l’art

La muse malade de Baudelaire

Le poème « La Muse malade » souligne l’opposition entre un passé grec rayonnant et un présent défini par la maladie et le péché. Dès lors, le poète s’interroge et se demande si sa muse (l’inspiration poétique) n’est pas perdue dans « un fabuleux Minturnes » (terme désignant un marécage romain), ce qui renvoie sinon à la boue du moins au bourbier.

Par ailleurs, dans Les Épaves, le poème « Le coucher du soleil romantique » propose une réflexion sur l’état de la poésie française en 1862. Ce soleil se couchant métaphorise le crépuscule de la poésie romantique et l’émergence de la poésie moderne qui est la poésie de la nuit, de la laideur et de l’angoisse :

L'irrésistible Nuit établit son empire, Noire, humide, funeste et pleine de frissons ;

Une odeur de tombeau dans les ténèbres nage, Et mon pied peureux froisse, au bord du marécage, Des crapauds imprévus et de froids limaçons.

On notera que le poète n’a pas d’autre choix que de subir cette disparition du soleil, pas plus qu’un Musset ne pourra échapper au mal du siècle.

Le désenchantement comme sujet poétique

Que restait-il à Baudelaire une fois que le soleil s’était retiré ? Une poésie de la nuit, de la boue, du péché. Mais alors la poésie devient œuvre alchimique et entreprend de transformer cette matière vile en or poétique. Le projet d’épilogue est une conclusion (inachevée voire inachevable ?) qui souligne que l’activité poétique consiste à transformer le mal en fleurs. Baudelaire s’est fait le poète du mal. Cf. projet de préface de la deuxième édition : « Des poètes illustres s'étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries du domaine poétique. Il m'a paru plaisant, et d'autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d'extraire la beauté du Mal. »

C’est donc aussi un défi poétique que le poète exprime dans L’Art romantique :

« Celui qui n’est pas capable de tout peindre, les palais et les masures, les sentiments de tendresse et ceux de cruauté, les affections limitées de la famille et la charité universelle, la grâce du végétal et les miracles de l’architecture, tout ce qu’il y a de plus doux et tout ce qui existe de plus horrible, le sens intime et la beauté extérieure de chaque religion, la physionomie morale et physique de chaque nation, tout enfin, depuis le visible jusqu’à l’invisible, depuis le ciel jusqu’à l’enfer, celui-là, dis-je, n’est vraiment pas poëte dans l’immense étendue du mot et selon le cœur de Dieu. »

Et il ajoute plus loin qu’en restreignant le champ poétique, « Vous infirmez ainsi le sens universel du mot poésie. » En somme, Baudelaire redéfinit la mission poétique traçant la voie (voix ?) à suivre. Que l’on songe à Rimbaud :

« Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux. — Et je l’ai trouvée amère. — Et je l’ai injuriée. »

Mais surtout il brise le lien tout classique entre art et beau. Le vrai, le beau et le bien, au XIXe, vont encore ensemble (persistance de la philosophie néo-platonicienne). Le titre Les Fleurs du mal liant le beau (fleurs) et le mal (laid) sonne comme une provocation. Baudelaire brise ce lien entre le beau et le bien et affirme que le mal peut être beau, suivant en ceci les préceptes romantiques (voir par exemple la préface de Cromwell ou le poème « J’aime l'araignée et j’aime l’ortie » de Victor Hugo dans Les Contemplations).

On peut enfin citer le projet de préface des Fleurs du mal dans lequel Baudelaire refuse de confondre « les bonnes actions avec le beau langage » et de confondre « l’encre avec la vertu ». Rompant avec la tradition poétique, refusant les sujets faciles (« les provinces les plus fleuries du domaine poétique »), Baudelaire entreprend un défi poétique : « Il m’a paru plaisant, et d’autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d’extraire la beauté du Mal ». En somme, le vrai, le bien et le beau ne s’impliquent plus. C’est « une invention de la philosophaillerie moderne » dit Baudelaire. Le vrai a son domaine : la science. Le bon, la morale. Le beau, l’art. Toute une esthétique moderne vient de naître : de la décadence au surréalisme en passant par le symbolisme.

On reprend les idées principales qui sont (en gros) :

La citation « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or » peut se lire comme une réponse au journaliste du Figaro.

Elle éclaire une partie du recueil, mais ne peut certainement pas prétendre l’éclairer tout entier.

Elle n’en constitue pas moins un projet esthétique novateur qui ouvre la porte de la modernité poétique.

Les mots de l'épilogue peuvent apparaître comme une réponse au Figaro et il est vrai que le recueil peut se lire comme un douloureux parcours de réussir l'entreprise alchimique mais il serait faux de l’y réduire tant il est vrai que le recueil des Fleurs du mal abonde en poèmes qui illustrent la beauté des choses, les trésors de la mémoire, le temps retrouvé... On peut encore évoquer la dimension sociale de certains poèmes de factures anciennes comme « Le vin des chiffonniers » (voir aussi la préface du livre de poche.) En fait, le recueil de Baudelaire est d’une richesse qui donnerait raison au poète quand il écrit « je me suis arrêté devant l’épouvantable inutilité d’expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit » (projet de préface). Il n’en reste pas moins que les Fleurs du mal si mal accueillies du vivant de l’auteur ont marqué leur siècle et redéfini l’enjeu poétique. Baudelaire bouleverse une France romantique néo-classique, baroque par certains aspects, gothique par d’autres mais fidèle à l’esprit de Raphaël. C’est la France de David et d’Ingres. Si Baudelaire est classique par certains côtés, il est sensible à d’autres conceptions de la beauté qu’il trouve notamment dans la peinture, chez Delacroix, chez Manet ensuite. Voir « Les Phares » (peintres qui ne sont pas classiques et qui ont un autre rapport de la beauté). Ne s’agit-il pas de trouver du nouveau absolument ?

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Quiz Baudelaire Fleurs du mal parcours Alchimie poétique

 Exercice pour la classe de 1ère réviser et préparer le bac blanc et l'examen du baccalauréat   Quiz sur le parcours bac  Alchimie poétique la boue et l’or. et le recueil  Les Fleurs du mal, Baudelaire

Selon Rémy de Gourmont, «Hugo n’a pas été un poète mais un orateur. » La lecture des Châtiments vous fait-elle partager cet avis ?

En quoi l’écriture poétique d’apollinaire, dans alcools, s’inscrit-elle entre tradition et modernité dissertation sur une oeuvre au programme, pensez-vous que les poèmes des contemplations de victor hugo ne servent à rien dissertation sur une oeuvre au programme, pensez-vous que la poésie de victor hugo, dans les quatre premiers livres des contemplations, ne soit qu'une poésie de la souffrance, en quoi peut-on dire que le recueil poétique de baudelaire procède d’une parfaite magie , « chaque œuvre devient un univers nouveau avec ses lois particulières ». dans quelle mesure cette réflexion éclaire t-elle votre lecture d’alcools , dissertation sur une oeuvre, les contemplations de victor hugo, sujet bac général 2021, métropole,, on a reproché à baudelaire de «tout peindre, de tout mettre à nu » dans son recueil les fleurs du mal. qu'en pensez-vous , la poésie de guillaume apollinaire s’invente-t-elle en rejetant le passé dissertation corrigée, bac 2021, les contemplations sont elles vraiment les "mémoires d'une âme" , la poésie lyrique est-elle nécessairement autobiographique la poésie autobiographique est-elle nécessairement lyrique, disserter sur une oeuvre intégrale en poésie, les fleurs du mal, baudelaire. 4 sujets corrigés, disserter sur une oeuvre intégrale en poésie, "alcools", apollinaire. 4 sujets corrigés, disserter sur une oeuvre intégrale en poésie, les contemplations, victor hugo, 7 sujets corrigés, disserter sur une oeuvre intégrale du bac 2023 en poésie, les contemplations, les fleurs du mal, alcools. 15 sujets corrigés.

Comprendre le parcours, Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal Alchimie poétique la boue et l’or. 3

Les Fleurs du mal, Baudelaire, Spleen et Idéal. Commentaires littéraires et linéaires. EAF 2023 10

Baudelaire, les Fleurs du mal, Tableaux parisiens à l'EAF 2023 2

Les questions de grammaire sur Les fleurs du mal de Charles Baudelaire PARCOURS - alchimie poétique la boue et l’or 1

Exercices bac français Baudelaire Les Fleurs du Mal /parcours Alchimie poétique : la boue et l'or-Evaluez votre niveau, testez vos connaissances

Date de dernière mise à jour : 27/11/2022

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Commentaire et dissertation

Commentaire et dissertation

Baudelaire dissertation.

Baudelaire dissertation. Le sujet traité ci-dessous porte su r Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire dans la perspective du parcours associé «  Alchimie poétique: la boue et l’or.  » Le sujet de dissertation est intégralement traité sous forme de plan détaillé. Il peut également permettre de faire une synthèse, une révision dans la perspective de la dissertation.

Sujet de dissertation: Peut-on dire que, dans Les Fleurs du mal , Baudelaire apparaît comme un alchimiste?

Mais en préambule: Qu’est-ce que l’alchimie? Nous nous appuyons sur les définitions proposées par le CNRTL:

  • Définition étymologique: Pratique de recherche en vogue notamment au Moyen Âge, ayant pour objet principal la composition d’élixir de longue vie et de la panacée universelle, et la découverte de la pierre philosophale en vue de la transmutation des métaux vils en métaux précieux.
  • En partic.  [En parlant de création poétique ou du langage] Transformation de la réalité banale en fiction hallucinatoire ou/et poétique.  Alchimie du verbe .

Problématique: Quelle est la fonction de la poésie baudelairienne?

1. La poésie baudelairienne et le lyrisme

Baudelaire, comme nombre de poètes au milieu du XIXème siècle, traite de sujets lyriques.

A. L’amour

A l’instar des poètes depuis l’Antiquité, Baudelaire traite avant tout de la question amoureuse. Citons « L’invitation au voyage » dans laquelle il propose une rêverie amoureuse. Il s’inscrit dans l’évocation de sentiments personnels et utilise la première personne du singulier.

B. Le voyage

Ensuite, Baudelaire a très tôt été forcé de voyager lorsque son beau-père militaire, le général Aupick, a voulu tenter de le mettre dans le droit chemin. Mais cette expérience lui a donné le goût de la découverte de l’exotisme, très en vogue au XIXème siècle.

C. Le spleen

Enfin, les Romantiques traitaient le thème de la nostalgie. Baudelaire va aller plus loin et traiter du spleen . (voir fiche sur le spleen ) Il propose un cycle composé de plusieurs poèmes du même titre afin de mettre en évidence la bataille qui se livre en lui entre l’Idéal et le Spleen . Nous pouvons par exemple renvoyer à «  Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle « .

Lorsque Baudelaire fait oeuvre de lyrisme, il s’inscrit souvent dans la lignée des Romantiques qui l’ont précédé.

2. La poésie dans Les Fleurs du mal : l’alchimie

A. de la banalité à la poésie.

Ainsi, dans « A une passante », Baudelaire donne à lire un poème qui repose sur un instant fugace, la rencontre d’une séduisante inconnue dans la rue.

B. De la laideur à la beauté

En effet, si Baudelaire crée un poème dans la lignée de l’Art pour l’Art avec « La beauté » qui renvoie à la beauté idéale et glacée de la statue, il parvient également et c’est exceptionnel à créer du Beau à partir de la plus grande laideur. Ainsi, dans «  Une charogne » , il décrit avec une grande poésie un cadavre en putréfaction croisé le long d’un chemin de promenade.

C. La beauté dans le mal

  • D’abord, le titre du recueil poétique, Les fleurs du mal , donne à penser grâce à l’oxymore (« fleurs » et « du mal ») la synthèse dont la poésie est capable.
  • Effectivement, Baudelaire se propose d’aborder des thèmes sulfureux tels que le vampirisme ou encore l’homosexualité féminine. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la première édition est interdite et fait l’objet d’un procès . Dans les six poèmes interdits, Baudelaire valorise par la poésie des situations qui sont décriées par la société de son époque.

3. La poésie Baudelairienne: une poésie qui réfléchit sur la poésie

A. la situation du poète.

Or, Baudelaire découvre très vite que le poète est différent du reste de la société. En effet, sa capacité à voir et à dire le monde fait de lui un être d’exception. Il l’explique dans « L’albatros » . Ainsi, cet oiseau est doté de grandes ailes, ce qui apparaît comme un atout en vol mais qui s’avère une grande difficulté sur terre lorsqu’il s’agit de marcher. Dans la morale de cet apologue, Baudelaire explique qu’il faut voir une comparaison entre la situation ambivalente du poète et celle de l’ albatros.

B. Le poète l’alchimiste

Puis, Baudelaire montre à plusieurs reprises dans le recueil que le poète est capable de transfigurer le réel. Effectivement, la beauté de la poésie lui permet de changer l’éclairage que l’on porte sur le réel. Ainsi, dans « Soleil », il compare l’oeuvre du soleil et celle du poète. Car tous deux sont capables de changer la vision que l’on a des choses et tous deux sont nécessaires à la vie.

C. Le voyant

Enfin, dans ses poèmes, Baudelaire va plus loin encore et fait du poète un être capable de déchiffrer des signes que le commun des mortels ne peut voir. Ainsi dans «  Correspondances « , le poète est celui qui déambule dans une forêt de symboles et qui est capable de leur donner du sens.

Merci de ta lecture. N’hésite pas à poster tes remarques et commentaires, il est important pour nous de savoir si le contenu correspond à tes besoins.

En complément de la fiche « Baudelaire dissertation », tu apprécieras certainement d’autres cours. Nous te proposons avant tout ceux ci-dessous:

– Procès des Fleurs du mal

– Analyse du recueil des Fleurs du mal

– Biographie de Charles Baudelaire

– Texte intégral « Une charogne »

– Explication linéaire « une charogne »

– Recuei l Les fleurs du mal en PDF

4 réflexions sur « BAUDELAIRE DISSERTATION »

d’un point de vue méthodologique, ce type de question (question fermée) appelle un plan dialectique

Bonjour, Merci de votre commentaire. En effet, ce type de question permet de recourir au plan dialectique mais il est parfaitement envisageable de construire sa réflexion sur un autre découpage.

Bonjour, je ne comprends pas bien La poésie Baudelairienne: une poésie qui réfléchit sur la poésie, pourquoi la poésie reflechirait-elle sur la poésie ? Merci d’avance pour votre reponse

Bonjour Philippe, Merci de cette question, elle nous permet de clarifier notre propos. La poésie qui réfléchit sur la poésie est en fait un métalangage. Autrement dit, c’est le même processus de réflexion sur soi-même que l’on peut retrouver dans un film qui traite du cinéma, de la façon de produire, de tourner…

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Correction de la dissertation

Baudelaire écrit dans le projet d’épilogue des Fleurs du mal  : « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or ». Dans quelle mesure ce vers s’applique-t-il à ce recueil poétique ?

Dissertation

Introduction.

Au mois de mai 1860, Charles Baudelaire travaille à un épilogue qu’il doit terminer comme il l’indique à son éditeur Poulet-Malassis : « Je travaille aux Fleurs du Mal . Dans très peu de jours, vous aurez votre paquet, et le dernier morceau ou épilogue, adressé à la ville de Paris, vous étonnera vous-même, si toutefois je le mène à bonne fin (en tercets ronflants) ». On sait ce qu’il en est et le poète n’a jamais achevé ce qui est resté un projet dans lequel Baudelaire déclare son amour pour la ville de Paris (« Je t’aime, ô capitale infâme !) et énumère (lupanar, débauches, vice...) ce qu’il résume à la fin par le terme « boue » : « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or ». Le substantif fait donc métaphoriquement référence à tout ce qui est vil, sans valeur voire moralement condamnable puisqu’au mot sont associées des connotations péjoratives se rapportant à l’abjection, à l’infamie (que l’on songe à des expressions comme « traîner dans la boue »). Alchimiste, le poète opère ainsi une transmutation de la boue d’un réel fort prosaïque en un or poétique. Cette citation de l’épilogue signifie-t-elle que le poète s’est rué dans la fange pour en faire le sujet de sa poésie ? Ce serait donner raison à ses détracteurs et, entre autres, à la critique du Figaro qui publiait ces lignes le 5 juillet 1857 : « L'odieux y coudoie l'ignoble, le repoussant s'y allie à l'infect. Jamais on ne vit mordre et même mâcher autant de seins dans si peu de pages ; jamais on n'assista à une semblable revue de démons, de fœtus, de diables, de chloroses, de chats et de vermine. » Peut-on donc affirmer que la poésie de Baudelaire est celle de l’ odieux , de l’ ignoble , en un mot de la boue ? Et si oui, faut-il voir dans l’ouvrage de Baudelaire un amoncellement fangeux moralement condamnable qui ne trouverait aucune justification sinon celle d’une boue qui ferait l'objet d’une transformation ? Nous verrons dans quelle mesure la citation de l’épilogue s’applique au recueil des Fleurs du mal , puis nous montrerons de quel nature est cet « or » poétique, et enfin quels sont les enjeux esthétiques d’une telle conception de la poésie.

Développement

1re partie : les fleurs du mal , œuvre alchimique , baudelaire, le poète de la boue.

Dans le projet d’épilogue, deux vers avant le vers « Tu m’as donné ta boue et j’en fait de l’or », Baudelaire se compare à « un parfait chimiste » lequel effectue donc cette opération de transformation de la boue en or. À l’autre bout du recueil, dès l’adresse « Au lecteur », cette opération de transmutation était — quoique pour des raisons très différentes — déjà évoquée dans la troisième strophe à travers les termes « Satan Trismégiste », « riche métal », « ce savant chimiste ». On trouve même une mention du « chemin bourbeux » emprunté par le poète et nous-même, l ‘« hypocrite lecteur ». La notion de « chimie » poétique voire d’ « alchimie » (que l’on songe à « Alchimie de la douleur ») traverse donc le recueil de part en part, du début à la fin. Le thème de la boue n’est pas moins omniprésent dans le recueil des Fleurs du mal . Qu’on pense au « Sept Vieillards » (« Dans la neige et la boue il allait s’empêtrant »), au « Vin des chiffonniers » (« Au cœur d’un vieux faubourg, labyrinthe fangeux » ) ou encore à « Brumes et pluies » (« Ô fin d’automne, hivers, printemps trempés de boue,/ Endormeuses saisons ! Je vous aime vous loue. »).

Ce ne sont que quelques exemples et l’on pourrait les multiplier (on retrouve le terme dans « Le Cygne », « Le Monstre »...). La boue est manifestement un thème que l’on ne peut manquer dans la poésie de Baudelaire. C’est que littéralement, dans le Paris du XIX e siècle, on marche dans la boue. On en a la preuve chez Baudelaire lui-même dans les Petits poèmes en prose  :

« — Mon cher, vous connaissez ma terreur des chevaux et des voitures. Tout à l’heure, comme je traversais le boulevard, en grande hâte, et que je sautillais dans la boue, à travers ce chaos mouvant où la mort arrive au galop de tous les côtés à la fois, mon auréole, dans un mouvement brusque, a glissé de ma tête dans la fange du macadam. Je n’ai pas eu le courage de la ramasser. »

Mais est-ce à dire que c’est là un simple thème traité par le poète en raison d’une familiarité certes bien ennuyeuse mais inévitable pour le Parisien du Second Empire ? En fait, on a vu et on verra que cette boue était l’objet d’une transmutation, d’une transformation poétique faisant de la laideur quelque chose de beau.

Transformation de la boue en or

Nous l’avons dit, la boue est une métaphore désignant aussi bien ce qui est sale physiquement (le Paris du XIX e siècle) que moralement (ceux qui habitent cette ville). Ainsi, la boue a partie liée avec le mal, avec la misère sociale dans « Le Vin des Chiffonniers » par exemple ou encore ans les deux « Crépuscules » où l’on croise « catins » et « escrocs » (« Le Crépuscule du soir ») et où s’expriment les « rêves malfaisants », « la lésine » (« Le Crépuscule du matin »). En somme, Paris devient chez Baudelaire le lieu allégorique du théâtre du mal dans la section des Tableaux parisiens ou du Vin . Ici, le temps, la vieillesse et la Mort sont omniprésents.

Il appartient toutefois au poète de sublimer cette matière, ce que montre le poème « Le Soleil » dans lequel l’astre transforme le réel :

Quand, ainsi qu’un poète, il descend dans les villes, Il ennoblit le sort des choses les plus viles, Et s'introduit en roi, sans bruit et sans valets, Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais.

Mais précisément, comme le soleil, la mission poétique consiste à faire la lumière sur ce qui est caché, à le montrer, à le révéler en somme, à non seulement l’exposer poétiquement, mais par la même occasion à l’embellir. Le laid devient donc beau comme dans « Une Charogne ». Plus précisément, c’est la représentation du laid qui devient belle. À qui s’interrogerait sur un tel choix esthétique, il conviendra de montrer qu’il y a là une dualité (comme le suggère la section Spleen et Idéal ). Le poète ne saurait choisir entre la boue et l’or. Ce ne peut être l’un ou l’autre, mais l’un et l’autre. La femme n‘est-elle pas à la fois muse et vampire (« Les Métamorphoses du vampire »), le poète n’est-il pas à la fois béni et maudit (voir, par exemple « Bénédiction »), etc. ?

2e partie : L’or poétique ou l’unité du dualisme

Correspondance.

L'impossibilité de ce choix se trouve dès le poème « Correspondances », dans lequel Baudelaire exprime l’idée d’un lien entre les contraires : « Dans une ténébreuse et profonde unité, / Vaste comme la nuit et comme la clarté, / Les parfums, les couleurs et les sons se répondent ». Dans ces vers, les opposés (la nuit et la clarté) sont donc indissociables (le poète parle bien d’ unité ). On pourrait multiplier les exemples qui soulignent l'entrelacs de la boue et de l’or, du beau et du laid. Que l’on songe aux nombreux oxymores tels que la « superbe carcasse » dans « Une Charogne », à leur coordination (« [...] noire et pourtant lumineuse » dans « Un Fantôme »), ou encore au titre qui fait de la beauté une fleur du mal. Le projet poétique est inscrit dès le titre dans l’alliance de ce nom (« fleurs » connoté méliorativement) et de ce complément (« du mal » connoté péjorativement). etc. Dans « Une charogne », on a une comparaison du cadavre avec une fleur ! Hypotypose de l'objet pour qu’on voie la charogne. Le poète nous met la mort devant les yeux. Excès de réalisme ? Non, rappel philosophique.

Non seulement les contraires sont indissociables, mais ils « se répondent ». Ils sont même constitutifs de la nature humaine. Rappelons-nous de la désormais célèbre double postulation dans Mon cœur mis à nu : « Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l'une vers Dieu, l'autre vers Satan. L'invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade ; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre. » Ainsi, la nature humaine est complexe. Un Guy de Maupassant ne dira pas autre chose (voir par exemple la nouvelle « Sur l’eau ») et Charcot ou Freud ne sont pas si loin.

Mais on aurait tort de croire, comme le journaliste du Figaro, que le poète se complait dans une fange immorale. D’une part, on l’a vu, le sujet est inéluctable, c’est une réalité topographique, mais surtout il s’inscrit dans un objectif poétique de transformation qui renvoie à un désir d’ailleurs, autre grand thème baudelairien. Le poème « Mœsta et errabunda » ne dit pas autre chose : « Emporte-moi, wagon ! enlève-moi frégate ! / Loin ! loin ! ici la boue est faite de nos pleurs ! » Baudelaire y évoque au vers 2 « l’immonde cité » qui dit assez par ailleurs la condamnation morale dont elle fait l’objet. Désir d’un ailleurs qui s’exprime tout au long des Fleurs du mal et conclut d’ailleurs le recueil dans « Le Voyage ».

L’art pour échapper à l’ici-bas

En effet, dans « Mœsta et errabunda », l’enjeu consiste bien à quitter cette boue. L’homme qui a les deux pieds dans la boue perçoit, dans un mouvement vertical, les cieux et, de la noirceur, contemple la lumière : « Tel le vieux vagabond, piétinant dans la boue, / Rêve, le nez en l’air, de brillants paradis ; » (« Le Voyage ») Somme toute, on a ici l’idée très platonicienne d’une transcendance perçue à travers le rêve.

Ainsi, les poèmes des Fleurs font valoir l’irrémédiable distance qu’il y a entre le monde et un ailleurs qui s’exprime dans un platonisme évident (remarquer le mot « Idée » avec une majuscule) dans « L’Irrémédiable » :

« Une Idée, une Forme, un Être Parti de l’azur et tombé Dans un Styx bourbeux et plombé Où nul œil du Ciel ne pénètre »

Mais ce qui prédomine alors, c’est l’idée d’une chute de l’humanité tombée dans le péché (la boue) d’où le vocabulaire très religieux qui abonde dans le recueil. Dès lors, seul l’art permet de rendre supportable la laideur du monde et le spleen qu’elle engendre. En somme, l’art, le beau rendent la boue supportable, ils rendent « L’univers moins hideux et les instants moins lourds ». (« Hymne à la beauté »)

On a vu que la boue et l’or étaient indissociables (voir encore à ce sujet « Hymne à la Beauté »). L’un ne va pas sans l’autre. Si la boue du réel est transformée en or de la poésie, y a-t-il là quelque chose de nouveau ? Eh bien, les poètes du XVI e ne faisaient pas autre chose. L’écriture a souvent eu pour objectif de transformer ce qui est douloureux en chant poétique. Que l’on songe au lyrisme d’Orphée ou à Joachim du Bellay qui dans Les Regrets (sonnet XII) écrit :

Je ne chante, Magny, je pleure mes ennuis, Ou, pour le dire mieux, en pleurant je les chante, Si bien qu’en les chantant, souvent je les enchante : Voilà pourquoi, Magny, je chante jours et nuits.

En somme, l'œuvre de Baudelaire s’inscrit dans une tradition poétique que l’on pourrait qualifier de classique, et ce sera l’un des premiers poncifs de la grande réhabilitation de Baudelaire notamment lors du cinquantième anniversaire de sa mort : Baudelaire est un classique. Seulement, ce serait aller un peu vite en besogne et omettre ce qui fait la spécificité de son œuvre.

3e partie : Modernité poétique de Baudelaire : vers une nouvelle définition de l’art

La muse malade de baudelaire.

Le poème « La Muse malade » souligne l’opposition entre un passé grec rayonnant et un présent défini par la maladie et le péché. Dès lors, le poète s’interroge et se demande si sa muse (l’inspiration poétique) n’est pas perdue dans « un fabuleux Minturnes » (terme désignant un marécage romain), ce qui renvoie sinon à la boue du moins au bourbier.

Par ailleurs, dans Les Épaves , le poème « Le coucher du soleil romantique » propose une réflexion sur l’état de la poésie française en 1862. Ce soleil se couchant métaphorise le crépuscule de la poésie romantique et l’émergence de la poésie moderne qui est la poésie de la nuit, de la laideur et de l’angoisse :

L'irrésistible Nuit établit son empire, Noire, humide, funeste et pleine de frissons ;

Une odeur de tombeau dans les ténèbres nage, Et mon pied peureux froisse, au bord du marécage, Des crapauds imprévus et de froids limaçons.

On notera que le poète n’a pas d’autre choix que de subir cette disparition du soleil, pas plus qu’un Musset ne pourra échapper au mal du siècle .

Le désenchantement comme sujet poétique

Que restait-il à Baudelaire une fois que le soleil s’était retiré ? Une poésie de la nuit, de la boue, du péché. Mais alors la poésie devient œuvre alchimique et entreprend de transformer cette matière vile en or poétique. Le projet d’épilogue est une conclusion (inachevée voire inachevable ?) qui souligne que l’activité poétique consiste à transformer le mal en fleurs. Baudelaire s’est fait le poète du mal. Cf. projet de préface de la deuxième édition : « Des poètes illustres s'étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries du domaine poétique. Il m'a paru plaisant, et d'autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d'extraire la beauté du Mal. »

C’est donc aussi un défi poétique que le poète exprime dans L’Art romantique :

« Celui qui n’est pas capable de tout peindre, les palais et les masures, les sentiments de tendresse et ceux de cruauté, les affections limitées de la famille et la charité universelle, la grâce du végétal et les miracles de l’architecture, tout ce qu’il y a de plus doux et tout ce qui existe de plus horrible, le sens intime et la beauté extérieure de chaque religion, la physionomie morale et physique de chaque nation, tout enfin, depuis le visible jusqu’à l’invisible, depuis le ciel jusqu’à l’enfer, celui-là, dis-je, n’est vraiment pas poëte dans l’immense étendue du mot et selon le cœur de Dieu. »

Et il ajoute plus loin qu’en restreignant le champ poétique, « Vous infirmez ainsi le sens universel du mot poésie. » En somme, Baudelaire redéfinit la mission poétique traçant la voie (voix ?) à suivre. Que l’on songe à Rimbaud :

« Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux. — Et je l’ai trouvée amère. — Et je l’ai injuriée. »

Mais surtout il brise le lien tout classique entre art et beau. Le vrai, le beau et le bien, au XIX e , vont encore ensemble (persistance de la philosophie néo-platonicienne). Le titre Les Fleurs du mal liant le beau (fleurs) et le mal (laid) sonne comme une provocation. Baudelaire brise ce lien entre le beau et le bien et affirme que le mal peut être beau, suivant en ceci les préceptes romantiques (voir par exemple la préface de Cromwell ou le poème « J’aime l'araignée et j’aime l’ortie » de Victor Hugo dans Les Contemplations ).

On peut enfin citer le projet de préface des Fleurs du mal dans lequel Baudelaire refuse de confondre « les bonnes actions avec le beau langage » et de confondre « l’encre avec la vertu ». Rompant avec la tradition poétique, refusant les sujets faciles (« les provinces les plus fleuries du domaine poétique »), Baudelaire entreprend un défi poétique : « Il m’a paru plaisant, et d’autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d’extraire la beauté du Mal ». En somme, le vrai, le bien et le beau ne s’impliquent plus. C’est « une invention de la philosophaillerie moderne » dit Baudelaire. Le vrai a son domaine : la science. Le bon, la morale. Le beau, l’art. Toute une esthétique moderne vient de naître : de la décadence au surréalisme en passant par le symbolisme.

Les mots de l'épilogue peuvent apparaître comme une réponse au Figaro et il est vrai que le recueil peut se lire comme un douloureux parcours de réussir l'entreprise alchimique mais il serait faux de l’y réduire tant il est vrai que le recueil des Fleurs du mal abonde en poèmes qui illustrent la beauté des choses, les trésors de la mémoire, le temps retrouvé... On peut encore évoquer la dimension sociale de certains poèmes de factures anciennes comme « Le vin des chiffonniers » (voir aussi la préface du livre de poche.) En fait, le recueil de Baudelaire est d’une richesse qui donnerait raison au poète quand il écrit « je me suis arrêté devant l’épouvantable inutilité d’expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit » (projet de préface). Il n’en reste pas moins que les Fleurs du mal si mal accueillies du vivant de l’auteur ont marqué leur siècle et redéfini l’enjeu poétique. Baudelaire bouleverse une France romantique néo-classique, baroque par certains aspects, gothique par d’autres mais fidèle à l’esprit de Raphaël. C’est la France de David et d’Ingres. Si Baudelaire est classique par certains côtés, il est sensible à d’autres conceptions de la beauté qu’il trouve notamment dans la peinture, chez Delacroix, chez Manet ensuite. Voir « Les Phares » (peintres qui ne sont pas classiques et qui ont un autre rapport de la beauté). Ne s’agit-il pas de trouver du nouveau absolument ?

À voir également

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  • Cours : Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire

Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire Cours

Parcours : réflexions sur « alchimie poétique : la boue et l'or ».

L'alchimie est une science du Moyen Âge, tandis que l'expression « boue et or » est un extrait d'un poème de Baudelaire. Le parcours invite à réfléchir sur une idée importante pour Baudelaire et de nombreux poètes du XIX e siècle : comment créer de la beauté à partir de la laideur.

L'alchimie est une science ésotérique qui s'est développée au Moyen Âge. Le processus a pour but de percer les secrets de la matière pour transformer un métal vil en métal précieux. Dans une perspective métaphorique, l'alchimie permet au poète de déchiffrer les secrets de l'Univers grâce au pouvoir des mots et du langage.

La deuxième partie de l'intitulé du parcours « la boue et l'or » vient d'un vers de Baudelaire. En 1857, il écrit dans l'esquisse d'un poème : « J'ai pétri de la boue et j'en ai fait de l'or » (« Orgueil », Les Fleurs du Mal ). Puis, dans un projet d'épilogue pour la deuxième édition du recueil Les Fleurs du Mal en 1861, le poète s'adresse ainsi à Paris : « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or ».

Transformer d'ignobles déchets en métal précieux, tel est l'ambition du poète : « Il m'a paru plaisant, et d'autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d'extraire la beauté du Mal. » (projet de préface pour la deuxième édition des Fleurs du Mal ). Baudelaire s'intéresse au mal sous toutes ses formes :

  • le mal moral car le vice et le sadisme hantent les hommes ;
  • le mal physique car le corps et les nerfs du poète souffrent des douleurs insupportables ;
  • le mal métaphysique car l'âme est angoissée par l'absence de Dieu mais elle est pourtant assaillie par le tourment du péché.

Pour métamorphoser cette boue en or, Baudelaire en fait un sujet de poésie. La sensibilité du poète et sa volonté créatrice l'amènent à porter un nouveau regard sur les objets les plus abjects.

L'intitulé du parcours invite à se poser diverses questions :

  • Faire œuvre de création, est-ce porter un nouveau regard sur un sujet ?
  • Comment la voix du poète invite-t-elle le lecteur à porter un nouveau regard sur un sujet ?
  • Y a-t-il une beauté propre au mal ?
  • Comment la métaphore de la boue et de l'or explique-t-elle le principe de création poétique ?

L'auteur : Charles Baudelaire (1821-1867)

Charles Baudelaire est né en 1821 et mort en 1867. C'est un poète à part, inclassable : il peut à la fois être associé au romantisme, au Parnasse ou au symbolisme. Son recueil Les Fleurs du Mal a eu un fort retentissement au moment de sa publication.

Portrait du poète Charles Baudelaire

Après une jeunesse tumultueuse, marquée par la mort de son père et le remariage de sa mère avec un homme pour lequel Baudelaire n'a guère d'affection, le poète dilapide l'héritage familial en menant une vie de bohème à Paris. Il fréquente les cercles littéraires, lit beaucoup et devient disciple de Théophile Gautier. Sa famille décide de le mettre sous tutelle pour l'arracher à cette vie qu'elle juge scandaleuse. Baudelaire est donc condamné à une existence miséreuse. Il rencontre le peintre Manet et se consacre à la critique d'art. Il découvre également Edgar Allan Poe, écrivain américain alcoolique et indigent, et entreprend de traduire ses œuvres. Comme Poe, Baudelaire préfère rester en marge de la société. Il rejoint ainsi les nombreux artistes qui refusent d'adhérer aux valeurs d'une société bourgeoise et conformiste.

Sous le Second Empire (1851-1870), époque du règne de Napoléon III, le gouvernement impose un retour à l'ordre moral. Le recueil des Fleurs du Mal paraît en juin 1857. Les critiques à son propos sont élogieuses mais le procureur impérial intente un procès à Baudelaire. Ce procès contribue à la malédiction baudelairienne : le poète se sent humilié et incompris. Le procureur, M. Pinard, incrimine treize poèmes du recueil. Ces pièces sont accusées d'outrage aux bonnes mœurs, à la morale religieuse et à la morale publique. Pour les magistrats, parler du corps, de nudité, de volupté, de sexualité et d'homosexualité est condamnable. Les Fleurs du Mal sont considérées comme un livre dangereux. Le poète est condamné à payer une lourde amende et doit retirer six poèmes de son recueil s'il veut le faire paraître. Le texte est modifié et réédité en 1861. Il faut attendre 1949 pour que sa version intégrale soit enfin autorisée.

Dès 1855, Baudelaire commence à rédiger un nouveau recueil : Petits poèmes en prose ou Le Spleen de Paris . Il prévoit d'écrire cent poèmes mais n'en rédige que cinquante. En effet, la fin de sa vie est marquée par la maladie. Atteint de syphilis, il meurt en 1867. Son dernier recueil est publié à titre posthume en 1869. En 1897 sont également publiées les notes, pensées et anecdotes de l'auteur sous le titre Mon cœur mis à nu .

L'œuvre : Les Fleurs du Mal , 1857 (1re édition) ; 1861 (2e édition)

Baudelaire voulait retracer la tragédie de l'être humain, cette alternance constante qui le pousse tantôt vers Dieu, tantôt vers Satan. On retrouve cette idée d'opposition dès le titre du recueil et dans la structure en six parties de l'œuvre.

« Dans ce livre atroce, j'ai mis toute ma pensée, tout mon cœur, toute ma religion (travestie), toute ma haine. »

Charles Baudelaire

Lettre à Maître Ancelle

Le recueil s'appelle d'abord Les Lesbiennes en référence aux habitantes de Lesbos, île de la mer Égée, capitale de la poésie lyrique. Puis Baudelaire choisit Les Limbes , titre plus mystérieux. La perspective est plus mystique puisque les limbes sont une sorte d'espace intermédiaire, le lieu où séjournent les enfants morts sans baptême. Mais un autre poète utilise ce titre et Baudelaire doit l'abandonner.

Les Fleurs du Mal est le titre définitif choisi par Baudelaire, troublante alliance que l'on pourrait considérer comme une provocation, une envie de choquer les bien-pensants. En effet, fleur et mal sont deux substantifs que la tradition poétique oppose. En poésie, le terme fleur connote l'innocence, la pureté, et symbolise souvent la jeune fille désirée. Au mal sont associés l'obscurité et l'informe. Baudelaire semble pourtant affirmer qu'il existe une beauté propre au mal.

« Le seul éloge que je sollicite pour ce livre est qu'on reconnaisse qu'il n'est pas un pur album mais qu'il a un commencement et une fin. »

Lettre à Alfred de Vigny

Baudelaire considère que les textes de son recueil forment un tout cohérent. Chaque pièce n'a de signification que mise en regard par rapport aux autres.

Les critiques se sont acharnés à trouver un sens à la structure du recueil mais il est plus prudent de proposer des hypothèses : dans la seconde édition, 126 poèmes sont regroupés en six sections de longueurs très inégales. Ces sections peuvent être considérées comme les étapes d'un voyage explorant la misère de l'homme. Les deux premières sections posent un constat et les quatre suivantes proposent des solutions pour combattre le spleen.

Les six sections de l'édition de 1861 sont les suivantes :

1) « Spleen et Idéal » : 85 poèmes

Si l'être est envahi par l'angoisse, c'est parce qu'il aspire au bonheur mais que rien ici-bas ne peut le contenter. Le poète est donc partagé entre un sentiment de spleen, d'ennui, de mélancolie, et son aspiration à l'idéal.

2) « Tableaux parisiens » : 18 poèmes

C'est une section que Baudelaire a ajoutée entre la 1 re et la 2 de édition. Baudelaire y peint ses errances dans un Paris en pleine mutation. Il y croise des figures insolites et des êtres déchus. Ses flâneries lui font découvrir la modernité urbaine mais accentuent aussi son sentiment de solitude.

3) « Le Vin » : 5 poèmes

L'alcool est présenté comme une échappatoire sombre et dangereuse : il procure un oubli bienfaiteur qui n'est que temporaire.

4) « Fleurs du Mal » : 9 poèmes

La luxure et les amours interdites sont les thèmes majeurs de cette section. Baudelaire les présente comme une autre forme d'évasion. Cependant, cette démarche est vaine. Il s'abandonne à la débauche mais n'échappe pas à son existence misérable.

5) «Révolte » : 3 poèmes

Les tentations charnelles étant illusoires, le poète se révolte contre Dieu en se tournant vers Satan, prince des déchus.

6) « La Mort » : 6 poèmes

Les échappatoires ayant été des échecs, la mort reste le seul espoir de l'homme. Elle est une promesse de voyage qui peut soulager les maux.

Textes-clés

« l'albatros », 1861.

« Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros , vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents 1 compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers.

À peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur , maladroits et honteux , Laissent piteusement 2 leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à côté d'eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule 3 ! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid ! L'un agace son bec avec un brûle-gueule 4 , L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées 5 Qui hante la tempête et se rit de l'archer 6 ; Exilé sur le sol au milieu des huées , Ses ailes de géant l'empêchent de marcher . »

1 Indolents : insensibles, indifférents. 2 Piteusement : d'une manière qui inspire la pitié. 3 Veule : qui n'a aucune volonté ou aucune force. 4 Brûle-gueule : pipe de marin à tuyau très court. 5 Nuées : gros nuages. 6 Archer : soldat tirant avec un arc.

  • Cruauté et sadisme des marins
  • Valorisation de l'albatros : oiseau majestueux
  • Vision pathétique de l'albatros
  • Déchéance de l'oiseau
  • Comparaison oiseau-poète

Mouvements du texte :

  • Premier mouvement, récit d'une anecdote, des marins torturent un albatros pour se divertir : de « Souvent, pour s'amuser » à « qui volait ! ».
  • Second mouvement, la portée symbolique de l'anecdote : de « Le Poète est semblable » à la fin.

L'essentiel du texte à retenir :

  • La valeur symbolique de l'albatros : « L'Albatros » n'est pas un sonnet mais sa composition y ressemble dans sa progression. Baudelaire raconte une anecdote et explique sa portée symbolique dans la dernière strophe. L'albatros est d'abord décrit comme un oiseau, puis il devient une allégorie. Il illustre l'idée que Baudelaire se fait du poète « maudit » : un être supérieur isolé des hommes à cause de son génie. Baudelaire développe ici un des thèmes chers aux romantiques.
  • Un poète déchiré entre spleen et idéal : ce texte appartient au cycle des poèmes qui célèbrent la grandeur de l'art et du poète dans la section « Spleen et Idéal ». Le poète assoiffé d'idéal au milieu des autres hommes subit l'isolement de l'homme de génie. Pour évoquer ces êtres singuliers que sont les artistes, Baudelaire choisit ici un symbole douloureux : l'albatros représente la dualité de l'homme cloué au sol et aspirant à l'infini.
  • « L'Albatros », une fleur du mal : c'est au-dessus du vide que l'oiseau peut déployer « ses ailes de géant ». La splendeur émane de la dysphorie (état de mal-être) comme le rappelle le titre du recueil. De façon paradoxale, l'angoisse et la tristesse se transforment positivement : l'albatros était « le roi de l'azur » et devient « le prince des nuées ». Il a gagné en jeunesse et en charme.

« Une charogne », 1857

« Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme , Ce beau matin d'été si doux : Au détour d'un sentier une charogne 1 infâme Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique 2 , Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique 3 Son ventre plein d'exhalaisons 4 .

Le soleil rayonnait sur cette pourriture , Comme afin de la cuire à point, Et de rendre au centuple à la grande Nature Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s'épanouir . La puanteur était si forte , que sur l'herbe Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride 5 , D'où sortaient de noirs bataillons De larves , qui coulaient comme un épais liquide Le long de ces vivants haillons 6 .

Tout cela descendait, montait comme une vague , Ou s'élançait en pétillant ; On eût dit que le corps , enflé d'un souffle vague, Vivait en se multipliant .

Et ce monde rendait une étrange musique, Comme l'eau courante et le vent, Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique Agite et tourne dans son van 7 .

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve, Une ébauche lente à venir, Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète Nous regardait d'un œil fâché, Épiant le moment de reprendre au squelette Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure , À cette horrible infection , Étoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion !

Oui ! telle vous serez , ô la reine des grâces, Après les derniers sacrements 8 , Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses, Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine 9 Qui vous mangera de baisers , Que j'ai gardé la forme et l'essence 10 divine De mes amours décomposés ! »

1 Charogne : animal en décomposition. 2 Lubrique : qui manifeste une forte attirance pour les plaisirs charnels. 3 Cynique : insolente et immorale. 4 Exhalaisons : odeurs émanant de certains corps. 5 Putride : en état de décomposition. 6 Haillons : vieux vêtements en lambeau. 7 Van : instrument qui permet de séparer les grains de la paille. 8 Sacrements : rite sacré administré à un mourant. 9 Vermine : vers. 10 Essence : substance essentielle.

  • Lexique de la nature, cadre de la promenade amoureuse
  • Oxymores valorisant la charogne
  • Apostrophes galantes
  • Évocation d'une odeur atroce
  • Analogie entre la femme et la charogne
  • Périphrases pour désigner la charogne et rendre compte de son caractère malsain
  • Détails répugnants
  • Métaphore et champ lexical de l'art et de la création
  • Premier mouvement, une scène idyllique troublée par une vision abjecte : de « Rappelez-vous » à « vous évanouir ».
  • Deuxième mouvement, description plus précise de la charogne : de « Les mouches » à « en se multipliant. ».
  • Troisième mouvement, réflexion sur le processus de création et le pouvoir de la poésie : de « Et ce monde » à « seulement par le souvenir. ».
  • Quatrième mouvement, détail macabre : de « Derrière les rochers » à « avait lâché. ».
  • Cinquième mouvement, portée symboliques, une leçon cruelle adressée à la femme aimée : de « Et pourtant » à la fin.

L'essentiel à retenir du texte :

  • Un poème macabre et ironique : dans ce poème, Baudelaire détourne avec ironie le topos romantique de la promenade amoureuse. En effet, il en appelle aux souvenirs de la femme aimée puisque la pièce s'ouvre sur un impératif : « Rappelez-vous ». Dans un cadre idyllique, le couple fait une atroce découverte. Avec une certaine complaisance et de très nombreuses précisions abjectes, le poète se remémore la vision repoussante d'une charogne. Aucun détail n'est épargné au lecteur et l'objet central du texte semble exercer une étrange fascination sur le poète.
  • Un poème qui renouvelle le topos du memento mori : les poètes de la Pléiade développent au XVI e siècle le motif du carpe diem . Ils invitent la femme à profiter du jour présent, lui rappelant que sa beauté et sa jeunesse sont éphémères. Baudelaire reprend ce motif et rappelle à la femme qui l'accompagne dans cette promenade champêtre qu'elle va mourir ( memento mori signifie en latin « Souviens-toi que tu vas mourir »). Mais il ne s'arrête pas à l'évocation de la mort comme ses prédécesseurs. Il décrit avec une étonnante précision le processus de décomposition du corps. La leçon à tirer de cette découverte, c'est que grâce à l'écriture, le poète peut reconstruire le réel détruit.
  • Un manifeste poétique, extraire la beauté du mal : le poète choisit la charogne comme sujet central de cette œuvre, allant à l'encontre de toute une tradition poétique. S'il magnifie, non sans ironie, cet animal en décomposition, c'est que le plaisir du poète est dans l'écriture, dans le processus de création. La beauté est dans la subversion, dans le rejet des convenances, des normes sociales et de la bonne morale de son époque.

« À une mendiante rousse », 1857

« Blanche fille aux cheveux roux , Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté ,

Pour moi, poète chétif 1 , Ton jeune corps maladif, Plein de taches de rousseur, À sa douceur .

Tu portes plus galamment Qu'une reine de roman Ses cothurnes 2 de velours Tes sabots lourds .

Au lieu d'un haillon 3 trop court , Qu'un superbe habit de cour Traîne à plis bruyants et longs Sur tes talons ;

En place de bas troués Que pour les yeux des roués 4 Sur ta jambe un poignard d'or Reluise encor ;

Que des nœuds mal attachés Dévoilent pour nos péchés Tes deux beaux seins, radieux Comme des yeux ;

Que pour te déshabiller Tes bras se fassent prier Et chassent à coups mutins 5 Les doigts lutins 6 ,

Perles de la plus belle eau, Sonnets de maître Belleau 7 Par tes galants 8 mis aux fers Sans cesse offerts,

Valetaille 9 de rimeurs Te dédiant leurs primeurs Et contemplant ton soulier Sous l'escalier,

Maint page 10 épris du hasard, Maint seigneur et maint Ronsard Épieraient pour le déduit 11 Ton frais réduit 12 !

Tu compterais dans tes lits Plus de baisers que de lis 13 Et rangerais sous tes lois Plus d'un Valois 14 !

— Cependant tu vas gueusant 15 Quelque vieux débris gisant Au seuil de quelque Véfour 16 De carrefour ;

Tu vas lorgnant en dessous Des bijoux de vingt-neuf sous Dont je ne puis, oh ! Pardon ! Te faire don.

Va donc, sans autre ornement , Parfum, perles, diamant, Que ta maigre nudité, Ô ma beauté ! »

1 Chétif : qui a peu de forces. 2 Cothurnes : chaussures montantes à semelles épaisses. 3 Haillon : vieux vêtement en lambeau. 4 Roués : personnes débauchées, de petite vertu. 5 Mutins : espiègles, malicieux. 6 Lutins : malicieux. 7 Belleau : poète français de la Pléiade. 8 Galants : hommes qui cherchent à plaire aux femmes. 9 Valetaille : terme péjoratif qui désigne l'ensemble des valets d'une maison. 10 Page : jeune homme au service d'un seigneur. 11 Déduit (ancien français) : divertissement, amusement amoureux. 12 Réduit : local exigu, généralement sombre et pauvre. 13 Lis : autre orthographe de « lys », fleur emblème de la monarchie française. 14 Valois : branche de la dynastie capétienne qui régna sur le royaume de France de 1328 à 1589. Elle succède aux Capétiens directs et précède les Bourbons. 15 Gueusant : mendiant. 16 Véfour : restaurant chic parisien.

  • Connotations positives et sensuelles
  • Lexique de la misère
  • Description méliorative valorisant la sensualité de la femme
  • Allusions au libertinage
  • Subjonctifs de souhait : comme une formule magique
  • Références historiques à la Renaissance, notamment à la Pléiade
  • Verbes de mouvement qui traduisent la liberté de la mendiante
  • Premier mouvement, portrait initial de la mendiante, une muse malade dont le poète entrevoit la beauté : de « Blanche fille » à « sabots lourds ».
  • Deuxième mouvement, processus de métamorphoses et vision onirique d'une femme séduisante et mystérieuse : de « Au lieu » à « Les doigts lutins. ».
  • Troisième mouvement, suite du processus de métamorphose, éloge paradoxal de la mendiante : de « Perles » à « Valois. ».
  • Quatrième mouvement, retour à la réalité et nouveau regard du poète : de « Cependant » à la fin.
  • La mendiante, une muse pour le poète : le poème est dédié à un être déchu en marge de la société. Baudelaire en fait un portrait à la fois exact et ambigu. Il évoque de façon réaliste sa situation misérable et douloureuse. Cependant, il émane de cette femme du charme et de la sensualité. Elle exerce un attrait puissant sur le poète car elle est un être à part et mystérieux.
  • L'alchimie poétique : Baudelaire invite le lecteur à voir au-delà des apparences. Il transforme peu à peu la mendiante en reine de roman. Il la débarrasse de ses haillons pour imaginer ses atours secrets sur un ton malicieux et lui prête de nombreux amants. Le ton du poème se fait incantatoire : le personnage réel devient un personnage fictif par la magie du verbe.
  • Une nouvelle définition de la beauté : les trois premières strophes du poème et les trois dernières encadrent celles où Baudelaire fantasme la mendiante autrement qu'elle n'est en réalité. Cependant, la vision qu'il en propose à la fin du poème n'est pas identique à celle du début : la mendiante est une femme libre dont la nudité n'est plus honteuse et qui n'a pas besoin d'artifices pour être belle.

Français Lycée 2de et 1re – nouveaux programmes

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Baudelaire, Les Fleurs du Mal

dissertation sur la boue et l'or

Le programme de première nous invite à étudier Les Fleurs du Mal en suivant le parcours suivant : « alchimie poétique : la boue et l’or ». 

Deux références peuvent éclairer cet intitulé. D’abord, un projet d’épilogue pour la deuxième édition des Fleurs du Mal  :

Ô vous ! soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. ( texte intégral en Annexe 1 )  

Par ailleurs, le sonnet « Alchimie de la douleur » :

Tu me rends l’égal de Midas, Le plus triste des alchimistes ; Par toi je change l’or en fer Et le paradis en enfer. ( texte intégral en Annexe 2 )

Charles Baudelaire

Or, si l’on retrouve bien « l’or » et la « la boue » (ou du moins « le fer ») dans ces deux textes, ainsi que le thème de « l’alchimiste » (ou du « chimiste »), ils semblent dire exactement le contraire. Dans le projet d’épilogue, la poésie présente cette vertu alchimique de transfigurer la « boue » en « or », la laideur en beauté, et peut-être même le mal en chose « sainte » : débarrassé de ses scories, le réel livre son essence pure, heureuse, précieuse. Mais dans « Alchimie de la douleur », le poète apparaît plutôt comme un « Midas » inversé : la science, le bonheur, la beauté, la moralité promises retournent à la boue, et le « paradis » espéré devient « enfer ».

Comment expliquer cette contradiction ? Le procès des Fleurs du Mal a sans doute contraint Baudelaire à présenter sa poésie sous un aspect moins sinistre. On peut envisager une lecture tactique de cet épilogue : il présente une moralité qui fut refusée au poète tout au long du procès. Des éléments biographiques pourraient également nous éclairer : peut-être le sonnet a-t-il été composé en des temps de grande détresse. Surtout, « Alchimie de la douleur » n’est qu’un poème du recueil, situé à la toute fin de la section, « Spleen et Idéal », quand les rêves d’élévation et d’exotisme font place au long cortège d’angoisses, de névroses et d’ennuis. Peut-être ce poème, pessimiste, morbide, appartient-il précisément à la « boue » qui sera, in fine , transformée, transsubstantiée en « or ». L’épilogue révélerait le processus alchimique du recueil.

Robert_Dunkarton_reine_nuit

Faut-il lever cette contradiction ? Trois lectures de l’intitulé sont envisageables, et pourraient guider l’étude du recueil.

1. La « boue » devient « or » : Baudelaire dispose de la pierre philosophale. Des poèmes sont certes prosaïques, désespérants mais, dans le creuset du recueil, ils sont transfigurés.

2. L’« or » devient « boue ». Baudelaire est le grand gâcheur : il dilapide son temps aussi bien que ses dons poétiques. Par ses sarcasmes et ses obsessions, sa poésie profane et corrompt tout ce qu’elle touche.

3. Le recueil est disparate, l’intitulé ne se prête pas à une lecture dynamique. « L’or » côtoie la « boue » comme « le Spleen » « l’idéal ». Des poèmes sont heureux, d’autres terribles, certains moraux, d’autres misérables.

Papillons Redon Oeuvres Baudelaire

Le professeur, en s’aidant du manuel l ‘esprit et la lettre , pourrait proposer une séquence qui montrerait toute l’ambivalence de l’intitulé au programme, « la boue et l’or ».

Séance 1 (1 heure)

Lors d’une première séance, on distribuerait aux élèves les deux poèmes que nous venons d’évoquer ( Annexes 1 et 2 ) ; on leur demanderait de les reformuler puis de les comparer. Ils découvriraient alors la promesse alchimique de la poésie, mais aussi la crainte que cette magie n’opère à rebours. La problématique de la séquence serait alors trouvée : la poésie de Baudelaire propose-t-elle une transformation positive de la réalité ? Est-elle transfiguration ou, au contraire, corruption ?

Cette problématique guiderait les élèves dans leur lecture du recueil (et pourrait faire l’objet d’un devoir à la maison) : quels poèmes relèvent de la « boue », lesquels de « l’or » ? Lesquels montrent une transformation heureuse ? Lesquels relèvent, au contraire de l’altération ou de la dégradation ?

Séance 2 (2 heures)

On consacrerait une autre séance à la lecture analytique du « Soleil » (texte p.44). Le soleil doré accomplit les promesses du prologue. Double du « poëte », il « ennoblit le sort des choses les plus viles », il lave toutes les boues, aussi bien les maladies physiques (« chloroses ») que morales (« soucis).

Séance 3 (1 heure)

Lors de cette séance on comparerait le poème avec le tableau de Turner, Hôtel de ville de Paris (p. 44). La poésie aussi bien que la poésie illuminent et métamorphosent les êtres et les lieux.

Turner Hôtel de ville de Paris Œuvres Baudelaire

Séance 4 (2 heures)

L’étude des « Métamorphoses du vampire » (p. 46), au contraire, montre l’échec de la poésie à transfigurer le réel. Une superbe femme à la « bouche de fraise » devient une horrible « outre aux flancs gluants » et ne présente plus que des « débris de squelettes ». On analyserait de même « Spleen » (p. 43) : les « affreux hurlements » succèdent aux « longs ennuis », l’Angoisse triomphe, et le poète échoue à transformer la boue en or. L’analyse du tableau de Munch, Le Vampire , compléterait cette étude. (p. 46) 

Le vampire Munch

Séance 5 (1 heure)

L’article de Gustave Bourdin, « Ceci et cela » (p.47), permet d’étudier la dimension morale des Fleurs du Mal , et de comprendre le scandale causé par le recueil. Selon ce critique, la boue reste laide et gluante, et les « putridités » évoquées par le poète sont « incurables ». Les élèves seraient amenés à chercher dans le recueil des poèmes pour illustrer ou, au contraire, réfuter l’article.

Séance 6 (2 heures)

Pour réutiliser les acquis des séances précédentes et préparer l’épreuve de la dissertation , on proposerait aux élèves le sujet suivant :

« La poésie a-t-elle pour fonction d’embellir la réalité ? » Pour répondre à cette question, vous évoquerez votre lecture des Fleurs du Mal ainsi que le parcours associé.

En groupe, on l’analyserait et chercherait un plan, des arguments et des exemples. Le manuel propose un corrigé de ce sujet (Méthode Bac, p. 570).

On solliciterait avec profit d’autres textes théoriques de Baudelaire pour répondre à cette question, notamment les Notes nouvelles sur Edgar Poe ( Annexe 3 ), ou le projet de préface pour la seconde édition des Fleurs du Mal ( Annexe 4 ).

Séance 7 (2 heures)

Une troisième lecture analytique, pour les séries générales, conclurait la séquence. Le poème « Correspondances » (p. 42) présente à la fois « l’or » et la « boue », « les parfums frais », et les parfums « corrompus, riches et triomphants », la « clarté » et la « ténébreuse » réalité. Il nous invite à accepter cette réalité repoussante et enivrante, belle parce que multiple. Seul cet alliage de corruption et de lumière permet de déchiffrer les « symboles » et les « confuses paroles ».

Écoutez le texte lu par le comédien

Séance 8 (2 heures)

En guise d’évaluation, les élèves auraient le choix entre deux sujets :

  • Commenter le poème « Le Crépuscule du matin », pour les séries générales (p. 45) ou « L’Albatros », pour les séries technologiques (p. 119).
  • Répondre au sujet de dissertation suivant : « Une poésie évoquant la laideur et la violence du monde est-elle amorale ? » Pour répondre à cette question, vous évoquerez votre lecture des Fleurs du Mal ainsi que le parcours associé.

Fabrice Sanchez Auteur de l’esprit et la lettre Enseignant en lycée (94)

A lire aussi : Quelles lectures choisir pour accompagner les œuvres intégrales ? 

Annexes Annexe 1 : Charles Baudelaire, « Alchimie de la douleur », « Spleen et Idéal », Les Fleurs du Mal , 1857.   LXXXI – ALCHIMIE DE LA DOULEUR

L’un t’éclaire avec son ardeur, L’autre en toi met son deuil, Nature ! Ce qui dit à l’un : Sépulture ! Dit à l’autre : Vie et splendeur !

Hermès inconnu qui m’assistes Et qui toujours m’intimidas, Tu me rends l’égal de Midas, Le plus triste des alchimistes ;

Par toi je change l’or en fer Et le paradis en enfer ; Dans le suaire des nuages

Je découvre un cadavre cher, Et sur les célestes rivages Je bâtis de grands sarcophages.

Annexe 2. Charles Baudelaire, Ébauche d’un épilogue pour la deuxième édition des Fleurs du Mal , 1861

Tranquille comme un sage et doux comme un maudit

Je t’aime, ô ma très belle, ô ma charmante… Que de fois… Tes débauches sans soif et tes amours sans âme,   Ton goût de l’infini Qui partout, dans le mal lui-même, se proclame… Tes bombes, tes poignards, tes victoires, tes fêtes, Tes faubourgs mélancoliques, Tes hôtels garnis, Tes jardins pleins de soupirs et d’intrigues, Tes temples vomissant la prière en musique, Tes désespoirs d’enfant, tes jeux de vieille folle, Tes découragements

Et tes jeux d’artifice, éruptions de joie, Qui font rire le Ciel, muet et ténébreux.

Ton vice vénérable étalé dans la soie, Et ta vertu risible, au regard malheureux, Douce, s’extasiant au luxe qu’il déploie.

Tes principes sauvés et tes lois conspuées, Tes monuments hautains où s’accrochent les brumes. Tes dômes de métal qu’enflamme le soleil, Tes reines de théâtre aux voix enchanteresses, Tes tocsins, tes canons, orchestre assourdissant, Tes magiques pavés dressés en forteresses, Tes petits orateurs, aux enflures baroques, Prêchant l’amour, et puis tes égouts pleins de sang, S’engouffrant dans l’Enfer comme des Orénoques, Tes anges, tes bouffons neufs aux vieilles défroques Anges revêtus d’or, de pourpre et d’hyacinthe, Ô vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or.

Annexe 3. Charles Baudelaire, Notes nouvelles sur Edgar Poe, 1857 Je ne veux pas dire que la poésie n’ennoblisse pas les mœurs, — qu’on me comprenne bien, — que son résultat final ne soit pas d’élever l’homme au-dessus du niveau des intérêts vulgaires ; ce serait évidemment une absurdité. Je dis que, si le poète a poursuivi un but moral, il a diminué sa force poétique ; et il n’est pas imprudent de parier que son œuvre sera mauvaise. La poésie ne peut pas, sous peine de mort ou de défaillance, s’assimiler à la science ou à la morale ; elle n’a pas la Vérité pour objet, elle n’a qu’elle-même.

Annexe 4. Projet de préface pour la seconde édition des Fleurs du Mal , 1861 Des poètes illustres s’étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries du domaine poétique. Il m’a paru plaisant, et d’autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d’extraire la beauté du Mal.

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L'École des Lettres – Revue pédagogique, littéraire et culturelle

Alchimie poétique : la boue et l’or (1re)

Haude de Roux

  • 8 octobre 2019
  • Arts , Littératures

3 commentaires

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Baudelaire, quand le dégoût inspire. Ces rebuts qui émaillent le monde

«  Ô vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or.  » ( Ibid. )
«  Je m’avance à l’attaque, et je grimpe aux assauts, Comme après un cadavre un chœur de vermisseaux  » (Poème 24, « Spleen et idéal »).
«  Blanche fille aux cheveux roux, Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté  » ( Ibid .)
« Le soleil rayonnait sur cette pourriture  », «  Et le ciel regardait la carcasse superbe  ».

Chaïm Soutine, « Carcasse de bœuf », vers 1925. Huile sur toile, 156,21 x 122,55 cm © Albright-Knox Art Gallery, Buffalo (New York).

La sublimation du laid

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«  Et tout cela refroidit lentement à la nuit, à la mort. Aussitôt, sinon la rouille, du moins d’autres réactions chimiques se produisent, qui dégagent des odeurs pestilentielles. »
«  Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s’épanouir. La puanteur était si forte, que sur l’herbe Vous crûtes vous évanouir.  » (« Une Charogne », poème 29, « Spleen et idéal ».)

Joseph Wright, « Alchimiste découvrant le phosphore », huile sur toile, 127 x 101, 6 cm, 1771 © Derby Musueum and Art Gallery

L’élan sacré, le geste mystique

«  Son manteau, tout mangé des vers, et jadis bleu, Étalé largement sur la chaude fournaise, Piqué de mille trous par la lueur de braise, Couvrait l’âtre, et semblait un ciel noir étoilé. »

Haude de Roux

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ANNEXE : LA POÉSIE DU XIX e au XXI e SIÈCLE

Exemple d’une progression en trois étapes sur l’objet d’étude des nouveaux programmes 2019 en classe de premières.

Une œuvre : « Les Fleurs du Mal » . Baudelaire, le poète alchimiste

Étape 2, transition

Histoire des arts Une inspiration commune : la carcasse à corps ouvert

Lecture parallèle

Un parcours associé Alchimie poétique : la boue et l’or. La beauté des rebuts

Haude de Roux

Merci beaucoup pour ce travail éclairant !

Travail exemplaire. C’est une nouvelle invitation au voyage

Travail précieux pour nos classes, merci. J’aime beaucoup la manière d’illustrer Baudelaire qui à mon sens parle essentiellement par images.

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Baudelaire, La boue et l'or

Par whillem   •  1 Mai 2021  •  Dissertation  •  954 Mots (4 Pages)  •  6 174 Vues

Baudelaire est un poète français né a paris en 1821, il est l’un des poètes les plus connus du XIXe siècle, car il inclus la modernité comme motif poétique. Il est considéré comme un poète « maudit » car il n’est pas dans les codes de la société de l’époque, ses poèmes ne sont pas bien pris, ils parlent de sujets morbides voir tabous. L’alchimie est l’art de la transmutation, permettant de convertir les métaux les plus vils en or. C’est aussi le cas de la poésie qui cherche à transformer le monde spirituellement par la parole.

Le poète Pierre Reverdy écrivait dans Le Livre de mon bord : « Transmuer la misère en sublime –– voilà le grand, l’incroyable et mystérieux coup d’alchimie. Non pas la matière en une autre matière mais bien la matière en esprit » Cette phrase montre le lien entre le but de la poésie et de l’alchimie qui est peut être finalement le même, transformer le mal en idéal. Nous nous demanderons donc comment ces propos peuvent s’adapter a notre lecture des fleurs du mal.

Dans un premier temps nous allons aborder la quête poétique en parlant du voyage et de la femme aimée et ensuite la quête alchimique en parlant de l’alchimie dans les poèmes de Baudelaire et de sa relation avec le diable.

Baudelaire comme on l’a compris est un homme qui souffre de sa propre existence et qui est sans cesse dans la quête de l’idéal. Le titre du recueil introduit bien l’idée générale de celui ci « les fleurs du mal », les fleurs et le mal sont très opposés, mais ces deux termes sont la car Baudelaire cherche a nous faire comprendre qu’à partir du mal, il vas essayer d’en cultiver quelque chose de bon.

Il s’intéresse à toute sorte de mal, le mal moral car le vice hante les hommes, physique car le corps du poète souffre de douleurs insupportables et métaphysique car l’âme est angoissée par l’absence de dieu mais tourmentée par le péché. Pour transformer le mal, Baudelaire en fait donc un sujet de poésie, La sensibilité du poète l’amène a porter un nouveau regard sur les objects les plus abjects.

En premier lieu nous pouvons considérer que la poésie est un échappatoire à cette triste et ennuyante réalité. Dans Les Fleurs du Mal, Baudelaire fait beaucoup référence à cet ennui et à cet appel de l’ailleurs qui le libérerait de cette misérable condition humaine. Nous pouvons le voir dans le poème « L’invitation au Voyage » où il idéalise un monde et aimerait y vivre. « Là, tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté. » Il évoque un monde anormalement parfait, ou le bonheur règne et que le monde réel ne saurait comprendre. C’est cette quête onirique remplie d’insatisfaction et de non acceptation de la réalité qui pousse Baudelaire à partir à la recherche d’un monde ou d’un ailleurs qui lui le comblerait. Il ressent indéniablement ce sentiment d’échec existentiel mais la poésie fait donc ici place d’une part en balayant les ennuis du quotidien et la vie réelle morose, et d’autre part en invitant le poète a entreprendre le voyage qui le libérerait de son ennui, un voyage où plus rien ne le contrarierait, ou n’auraient plus leur place le banal, le cruel, juste le bonheur. Très souvent cette recherche du bonheur se fait par un rêve d’un voyage idéalisé car la réalité n’est

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La Classe du Littéraire

Explications de textes, biographies d'auteurs, méthodologie, grammaire … Tout pour le Bac de Français et les études littéraires.

L’alchimie poétique dans les Fleurs du mal de Baudelaire

L’alchimie poétique est un thème fondamental du célèbre recueil Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire. L’idée de transformation et de sublimation, parfois corruption, transcende l’oeuvre, est une clé d’analyse primordiale pour lire ce fascinant ouvrage.

Les Fleurs du Mal est le recueil le plus connu de Charles Baudelaire. Après sa publication en 1857, il est condamné pour obscénité, et plusieurs poèmes sont retirés. Le recueil peut être lu selon plusieurs parcours, l’amour, le spleen, et l’alchimie poétique.

Brève introduction à l’alchimie poétique

Quel est le principe de l’alchimie .

Pour comprendre cette idée d’alchimie poétique, il faut en revenir à cette science mystique datant du IXe siècle avant Jésus Christ. On trouve les traces des premiers alchimistes en Égypte ancienne. Ils pensaient pouvoir transformer les métaux en or et prolonger la vie indéfiniment.

Pour atteindre ces deux buts, les alchimistes recherchaient la pierre philosophale. Cette quête étaient appelée le Grand Oeuvre.

Les traités d’alchimie que l’on a retrouvés mentionnent 3 étapes au Grand Oeuvre supposées déboucher sur la fabrication de la pierre philosophale : l’oeuvre au noir, l’oeuvre au blanc et l’oeuvre au rouge.

L'alchimie poétique dans les Fleurs du mal de Baudelaire (Bac 2023)

Mais donc c’est quoi l’alchimie poétique ?

L’alchimie poétique est une image dérivée de l’alchimie mystique. Le poète compare la poésie à la pierre philosophale dont le Grand Oeuvre serait de pouvoir transformer la banalité du réel en merveille poétique, le laid en beau et le banal en sublime.

Ainsi le poète, par le langage poétique, serait capable de sublimer la réalité, de la transformer en or. La poésie, comme l’alchimie, est également porteuse d’éternité en cela qu’elle fige des image et des sentiments dans le temps. Donc l’alchimie poétique sublime et préserve.

L’alchimie poétique dans les Fleurs du Mal

Qu’est-ce que l’alchimie poétique dans les fleurs du mal .

L’alchimie est rarement mentionnée directement dans le recueil Les Fleurs du Mal de Baudelaire. Cependant, de nombreux poèmes y font référence en cela qu’ils s’appuient sur la laideur d’un sujet qui devient sublimé par la parole poétique. L’alchimie poétique revient à transformer le réel.

Tout au long du recueil, on retrouve donc des poèmes où la laideur et la banalité du réel sont transformés par le poète, le mal peut recouvrer sa beauté essentielle, ce qui explique le choix de certains sujets très sombres, comme le poème “ À une charogne ” rapprochant la femme aimée d’un cadavre en décomposition.

Qu’est-ce que la boue et l’or dans Les Fleurs du mal ?

Baudelaire évoque lui-même dans son projet d’épilogue la volonté de changer la “boue” en “or”. C’est une manière pour lui d’exposer le processus d’alchimie poétique. On retrouve ce passage de la boue à l’or jusqu’au titre de la partie “Spleen et idéal”.

L’alchimie poétique dans Les Fleurs du mal est donc également liée au spleen, car l’alchimiste cherche aussi à améliorer sa propre vie. Baudelaire pourrait donc lutter contre ce mal de vivre en extrayant la beauté caché dans l’essence de toute chose.

Comment Baudelaire aborde la figure de l’alchimiste ?

Baudelaire aborde de front la figure de l’alchimiste dans le poème “Alchimie de la douleur”. On y peut voir un poète alchimiste qui subit son don puisqu’il ne parvient qu’à une alchimie inversée, c’est à dire que tout ce qu’il fait revient à corrompre le réel.

Poème “Alchimie de la douleur” :

L’un t’éclaire avec son ardeur, L’autre en toi met son deuil, Nature ! Ce qui dit à l’un : Sépulture ! Dit à l’autre : Vie et splendeur ! Hermès inconnu qui m’assistes Et qui toujours m’intimidas, Tu me rends l’égal de Midas, Le plus triste des alchimistes ; Par toi je change l’or en fer Et le paradis en enfer ; Dans le suaire des nuages Je découvre un cadavre cher, Et sur les célestes rivages Je bâtis de grands sarcophages. Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire

On remarque dans ce poème les références à Hermès Trismegiste et au roi Midas. Le premier est le dieu fondateur de l’alchimie dans la mythologie gréco-égyptienne. Le second, roi ayant reçu le don/malédiction de voir tout ce qu’il touchait en or, permet de rapprocher l’alchimiste d’un être maudit.

Par ailleurs, le lexique de la mort est omniprésent dans le poème. Ainsi, Baudelaire crée une figure de poète alchimiste chargé d’un fardeau qu’il ne parvient pas à porter. C’est l’échec de l’alchimie poétique qui est montré ici, comme une souillure supplémentaire du monde.

Quels poèmes de Baudelaire associent la poésie à une quête alchimique ?

Dans Les Fleurs du mal de Baudelaire, de nombreux poèmes sont à associer au thème de l’alchimie poétique. On retrouve par exemple le poème “Alchimie de la douleur”, mais aussi les poème “ À une charogne ” ; “ L’albatros ” ; “Spleen IV” ainsi que plusieurs autres.

En fait, Charles Baudelaire place son recueil sous le signe de l’alchimie dès le titre : “ Les Fleurs du mal ” porte une sorte d’antithèse en opposant la connotation positive des fleurs à l’idée du mal. De plus, la floraison elle-même est une alchimie.

Les nuances de l’alchimie poétique dans Les Fleurs du mal

Présenter Les Fleurs du mal comme un recueil visant uniquement à extraire la beauté du réel serait extrêmement réducteur.

D’abord, il est important de rappeler que le poète, comme Baudelaire le souligne dans “L’albatros” est un être isolé. S’il cherche à montrer l’essence des choses par sa poésie, peu nombreux sont ceux qui peuvent le comprendre.

De plus, l’alchimie peut être vue comme une entreprise vouée à l’échec. En témoigne le poème “Alchimie de la douleur” où le poète n’arrive finalement à bâtir que “de grands sarcophages”.

Est-il condamné, comme l’alchimiste à une quête toujours infructueuse qui revendrait donc à ne faire que remuer la fange sans pouvoir en faire de l’or ?

Pourtant, l’alchimie permet au moins de prolonger la vie d’une certaine façon.

Pensons aux deux derniers vers du poème “À une charogne” : “j’ai gardé la forme et l’essence divine / De mes amours décomposés !” Le poète affirme bien ici qu’après sa mort, la femme conservera son essence au sein de la poésie, l’alchimie n’est donc pas un échec complet.

Pour conclure sur l’alchimie poétique dans Les Fleurs du mal

Si l’idée d’alchimie et de transformation de la boue en or apparait dès le titre du recueil et résonne dans de nombreux poèmes, ne perdons pas de vue que le recueil est vaste et complexe.

Sa lecture alchimique ne doit pas masquer les enjeux symbolistes, la pesanteur du spleen ou encore l’érotisme de certains poèmes.

Cependant, il est important de garder à l’esprit cette volonté de sublimer le réel dans de nombreux poèmes.

Baudelaire n’est pas seul à s’emparer de cet imaginaire de l’alchimiste, on peut citer par exemple “ L ‘alchimiste ” d’Aloysius Bertrand ou “ Vénus Anadyomène ” d’Arthur Rimbaud pour ouvrir la réflexion.

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"passe ton bac d'abord ", alchimie poetique : baudelaire, les fleurs du mal, 1857.

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Le parcours associé à l’étude intégrale des Fleurs du Mal s’intitule « Alchimie poétique : la boue et l’or ».  

Il faudra donc nous interroger sur l’idée d’Alchimie qui suppose une transformation, une transmutation. Ici c’est le célèbre vers de Baudelaire : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or »   qui servira de fil conducteur à notre étude.

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Ô vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. Charles Baudelaire, Ébauche d’un épilogue pour la deuxième édition des  Fleurs du Mal (1861)

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Recueil des Fleurs du Mal (intégral, PDF)

I. LE CONTEXTE SOCIO-POLITIQUE

Le XIX° siècle voit se succéder de nombreux régimes politiques.

Baudelaire nait sous la Restauration (1815-1830) c’est à dire le retour d’un monarchie (parlementaire) par Louis XVIII après la chute de Napoléon 1 er .(Et surtout après la Révolution de 1789)

Suivra la Monarchie de Juille t (1830-1848) plus libéral que la Restauration, Louis-Philippe est appelé roi des Français et non plus roi de France.

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  En 1848 des émeutes mettent à bas le Monarchie de Juillet qui sera remplacée par la II° République (1848-1852).  

C’est le neveu de Napoléon Ier , Louis Napoléon qui devient Président par une élection au suffrage universel. Mais par le coup d’État du 2 décembre 1851 il s’octroie tous les pouvoirs et en 1852 , proclame le Second empire qui durera jusqu’en 1870

Ce Second Empire qui durera 18 ans est une période de profonds changements économiques et sociaux. Depuis la révolution industrielle (1830) la bourgeoisie est en pleine expansion. Elle impose ses valeurs morales et ses modes de vie.   Même si Baudelaire n’a pas l’engagement politique de Victor Hugo qui le paiera par un exil de 18 ans son opposition à celui qu’il appelle Napoléon le petit, sa poésie est néanmoins   nourrie de son époque, de ses changements et de sa « boue ».

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Au XIX° , l’industrialisation engendrée par la Révolution industrielle (1830) va provoquer un fort exode rural : beaucoup viennent s’installer dans les grandes villes et notamment Paris. Les conditions de vie dans certains quartiers sont insalubres. Louis Napoléon Bonaparte va confier au baron Haussmann la charge de moderniser la ville* .

Baudelaire écrit dans le poème Le Cygne « Le vieux Paris n’est plus ». Et pour lui « Il y a dans tout changement quelque chose d’infâme et d’agréable à la fois, quelque chose de l’infidélité et du déménagement. »

La ville est pour lui un thème dominant.

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Le pouvoir du Second Empire (Napoléon III) veut faire régner un  “ordre moral” . De ce fait la censure est active. Baudelaire va être poursuivi en justice et un procès aura lieu pour condamner cette œuvre dont certains   poèmes sont considérés comme  “offense à la morale religieuse”   et   “offense à la morale publique et aux bonnes mœurs » , ce sont les pièces condamnées qui devront être retirées du recueil :  Les Bijoux, le Léthé, A celle qui est trop gai, Lesbos, Femmes damnées, Les Métamorphoses du vampire. Baudelaire sera condamné à 300francs d’amende.   La même année, la publication du Madame Bovary de Flaubert, aboutit également à un procès pour immoralité :   l es réalistes  sont accusés de vouloir démoraliser la population en montrant la misère.   

  En 1861, parait une nouvelle édition des Fleurs du Mal que l’auteur a enrichie de plusieurs poèmes. Mais Il faudra attendre 1949 pour que l’interdiction des « pièces condamnées » soit levée !

  Les Fleurs du Mal sont publiées en 1857. Cette œuvre va choquer la morale bourgeoise. La critique   du Figaro est assassine : le 5 juillet 1857 , Gustave Bourdin écrit «  L’odieux y coudoie l’ignoble; le repoussant s’y allie à l’infect » .  

Le 12 juillet , un nouvel article du  Figaro     : « Toutes ces horreurs de charnier étalées à froid, ces abîmes d’immondices fouillés à deux mains et les manches retroussées, devaient moisir dans un tiroir maudit. Mais on croyait au génie de M. Baudelaire, il fallait exposer l’idole longtemps cachée à la vénération des fidèles. Et voilà, qu’au grand jour l’aigle s’est transformé en mouche, l’idole est pourrie et les adorateurs fuient en se bouchant le nez » …

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II. LE CONTEXTE LITTERAIRE & ARTISTIQUE

Le mouvement romantique ,* né dans les dernières décennies du XVIII° dans les pays nordiques (Angleterre, Allemagne…),   poursuit son chemin jusque vers le milieu du XIX°.  

Le mouvement s’est construit autour du refus des contraintes de l’âge classique (17°), de ses règles trop strictes, d’où l’admiration que les romantiques auront pour le théâtre de Shakespeare.

« Le beau, c’est le laid » affirme déjà le jeune Hugo. L’artiste est invité à ne suivre que son inspiration, à « déniaiser » l’alexandrin …

En France, la poésie d’Hugo, de Vigny, de Lamartine … laisse une place considérable au « je » lyrique , ce qui n’empêche pas ces artistes d’être très e ngagés politiquement. L’épopée napoléonienne (Napoléon 1 er ), au lendemain de la Révolution de 1789, a montré que des hommes partis de rien pouvaient connaitre un destin extraordinaire. Le romantisme exalte les thèmes du destin, de la mélancolie, de l’imaginaire, du fantastique, de la mort, du satanique, de l’occulte, du rapport de l’homme au temps …   L’objectif de la poésie romantique est d’exprimer tous les états d’ âme   d’une conscience saisie par le vertige du temps  

Face aux changements, le « moi » s’analyse et la poésie exprime à la fois désarroi et consolation. Et parler de soi, pour les romantiques, c’est parler du monde. Hugo voit dans le poète un guide  ; quant à Baudelaire , il voit le poète comme un traducteur capable de percevoir par les correspondances , le sens caché des choses ouvrant ainsi la voie au symbolisme .

Le romantisme se retrouve dans tous les genres littéraires : roman, poésie, théâtre…    

Mais vers 1840 , un mouvement qui ne porte pas encore ce nom prend une place considérable, notamment dans le roman : le REALISME . Balzac est l’un des premiers à vouloir « faire concurrence à l’état civil » tandis que Stendhal considère l e roman comme « un miroir que l’on promène sur un chemin ».

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Toutes les mutations économiques, politiques et sociales se retrouvent dans les œuvres littéraires ; mais aussi les angoisses d’une époque en pleine mutation : mal du siècle, dégoût, spleen…   L’œuvre réaliste se doit d’être attentive à la vie sociale, aux mœurs, aux mécanismes politiques et sociaux et aux sciences nouvelles. Ce roman réaliste reflète souvent en s’en moquant, un monde bourgeois et petit   bourgeois .

Une fois de plus le réalisme est un phénomène de réaction par rapport au romantisme. Et vers 1870   , le naturalisme dont Zola est le chef de fil, cherchera à peindre le milieu des affaires, la naissance des grands magasins, les bourgeois corrompus, la misère ouvrière, le travail aliénant de l’usine…   Influencé par les théories scientifiques de son temps, Zola observe   les faits sociaux comme des phénomènes cliniques expérimentaux  ; et aussi il faut écrire   « l’histoire naturelle et sociale de son temps »   : il cherche à montrer l’interaction qu’il y a entre l’individu et son milieu. Très influencé par les théories de   l’hérédité dans la constitution psychologique de la personne, il voit l’individu comme pris dans un réseau de conditionnements. Les mille personnages de son œuvre les Rougon Macquart en sont l’illustration. 

 E. Manet et le réalisme

en peinture

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Mais certains poètes romantiques, comme Théophile Gautier (1811–1872) manifestent une certaine ironie devant l’ego de ses pairs. Voir   le poète   comme un inspiré divin éclairant les humains lui paraît grotesque ;    il va privilégier la beauté du poème plutôt que son propos. C’est la naissance du PARNASSE * qui revendique un art qui ne sert à rien , et qui n’existe que par sa beauté  : « il n’y a vraiment de beaux que ceux qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid » préface à Mademoiselle Maupin , 1836

C’est la théorie de « l’art pour l’art » qui influencera Baudelaire puis les symbolistes. D’ailleurs Baudelaire dédiera Les Fleurs du mal à Théophile Gautier  

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Théophile Gautier qui restera célèbre pour ses romans et ses contes fantastiques comme Le Roman de la momie ou Le Capitaine Fracasse, est un a mateur d’idéal qui pour contrebalancer l’insatisfaction devant le monde réel, demande à la forme de créer de la beauté . Parmi les parnassiens célèbre on retrouvera Leconte de L’Isle par exemple. Le choix même du mot Parnasse , montagne située   près de Delphes où sont censés résider Apollon et ses muses, témoigne de l’image que les parnassiens ont de leur art. Baudelaire, comme Gautier pense que la poésie est d’abord maîtrise du langage, musique et forme

Les poèmes de Baudelaire combinent donc romantisme, formalisme de l’art pour l’art et en même temps portent en germe le symbolisme à venir de Verlaine ou Mallarmé.

La modernité poétique de Baudelaire se trouve précisément dans cet art nouveau et qu’il retrouvera chez Delacroix par exemple. Baudelaire est à la fois un héritier et un précurseur.  

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A la fin du siècle, un certain nombre de poètes se reconnaissent en Baudelaire et par réaction sans doute au réalisme et au   naturalisme, refusent de voir le monde comme rationnel. Pour eux ,la vérité se dérobe derrière des symboles, des signes. Le réel n’est qu’apparence et le poète va chercher le sens caché, faire jaillir la vérité. Pour cela, il utilisera les correspondances , le symbole  : celui-ci transpose l’idée en image, crée des analogies, donne une place essentielle à la musicalité de la langue et demande aux lecteurs un effort de déchiffrement.

Stéphane Mallarmé est resté comme le maître du symbolisme . Le réel lui parait sans intérêt   et la vie bien trop répétitive. Dans Brise marine , il écrit « la chair est triste, hélas, et j’ai lu tous les livres » . Et comme Baudelaire, il rêve d’ ailleurs . Mais pour échapper à la banalité, au vers déjà dit, Mallarmé et d’autres symbolistes aboutiront à une poésie élitiste,   hermétique, destinée à quelques initiés…

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Rimbaud , l’homme aux semelles de vent , partage avec Baudelaire le goût de l’ivresse et le pousse à l’extrême. Pour lui, le poète doit être un voyant, se faire voyant « par un long et raisonné dérèglement de tous les sens » .   Rimbaud n’écrira que pendant quelques années (de 17 à 20 ans) mais après lui, la poésie ne pourra plus jamais être la même.

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III. L'AUTEUR : Charles Baudelaire (1821-1866)

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Né en 1821 , Charles Baudelaire devient orphelin de père à six ans.   Sa mère se remarie un an plus tard avec le général Aupick. Baudelaire refusera cette union et sera toujours en opposition avec ce militaire aux valeurs et aspirations trop différentes des siennes.  

Admis au lycée Louis le Grand à Paris en 1836, qui à l’époque   est déjà un lycée prestigieux, Baudelaire y poursuit ses études   durant trois ans, jusqu’à son renvoi, en avril 1839, alors qu’il est en classe de philosophie (Terminale actuelle). Il a alors 18 ans, et se montre déjà peu docile et rebelle. Un jour, il refuse de remettre un billet qu’un de ses camarades lui a glissé et l’avale   affirmant qu’il «  aime mieux toute punition que de livrer le secret de son camarade »  .

Son renvoi de Louis-le-Grand fut en réalité le résultat de désobéissances continuelles. Il obtient néanmoins le baccalauréat en août 1839.   Finalement, ni le carcan de l’enseignement classique prodigué par des professeurs intransigeants et hautains, ni les attentes de son beau-père et de sa mère n’ont réussi à contenir le caractère explosif de celui qui allait ouvrir la voie à la poésie moderne. 

  Après le bac, malgré la volonté de ses parents, il refuse de tenter toute carrière autre que la littérature et   choisit délibérément une vie de bohème.   Par décision de son conseil de famille, qui n’apprécie guère la vie dissolue du jeune homme, il   embarque   en 1841 à bord d’un paquebot pour les Indes. Il n’ira pas jusqu’au bout mais ce voyage deviendra une source d’inspiration pour Charles : il en retire un grand nombre d’impressions dont il s’inspire dans ses poèmes ( L’Albatros, Parfum exotique …).

A son retour en France d ix mois plus tard, il atteint sa majorité et touche alors   le capital   important qui lui revient   sur l’héritage paternel (environ 75,000 francs). 

Il choisit d’habiter l’île Saint-Louis, lie des relations amicales avec d’autres jeunes poètes ou artistes, notamment   Théodore de Banville. Et il dépense des fortunes en costumes, cravates et décoration de ses lieux de vie successifs sur l’ile Saint Louis.   C’est un Dandy*

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C’est alors qu’il rencontre Jeanne Duval , jeune métisse, qui devient sa maîtresse. Il lui dédie certaines de ses poésies comme La chevelure ou Les bijoux . Il dépense sans compter l’héritage qu’il a reçu de son père, ce qui incite sa famille à le placer sous tutelle judiciaire.

  Il est alors contraint de travailler pour subvenir à ses besoins et devient journaliste et critique d’art.   Il commence à écrire certains poèmes des Fleurs du Mal, il a 23 ans.

Il publie le   Salon de 1845 et l’année suivante, un second Salon . Il y affirme hautement, comme dans le premier, son admiration pour Eugène Delacroix, rend   un juste hommage aux supériorités de M. Ingres,   Le temps s’est chargé de confirmer presque tous les jugements, alors singulièrement audacieux et personnels, qu’il a formulés   .

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En 1847 , Baudelaire tombe sous le charme de Marie Daubrun, métisse également. Celle-ci lui inspira éalement plusieurs poèmes. Il découvre l’écrivain américain Edgar Allan Poe .   Il traduit de nombreuses oeuvres de l’auteur pour le faire connaître aux Français : Contes extraordinaires (1854), Histoires extraordinaires (1856)…  

Et e n 1848 Baudelaire s’engage dans la révolution   , il croit à l’idéal républicain et humanitaire, qui le fait monter sur les barricades, enivré par l’insurrection populaire. Mais il n’y croit pas longtemps. Selon ses propres termes , il se « dépolitisera » ensuite… atterré par la répression des journées de juin et terrifié par le coup d’État du 2 décembre 1851…

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  Un peu plus tard, c’est Apollonie Sabatier qui occupe toutes ses pensées.  

En juillet 1857, Charles Baudelaire publie son œuvre majeure : Les Fleurs du Mal. Ce recueil de poèmes est condamné “pour outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs”. Baudelaire et son éditeur doivent payer une lourde amende.  

Les Fleurs du Mal   ont fait scandale principalement en raison de leur réalisme. Les termes du verdict du procès le disent clairement. L’ouvrage est condamné pour offense à la morale publique et aux bonnes moeurs en raison de «l’effet funeste des tableaux» qui, «dans les pièces incriminées, conduisent nécessairement à l’excitation des sens par un réalisme grossier et offensant pour la pudeur» . Ce réalisme était particulièrement choquant en poésie.

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  Les Paradis artificiels   (1861) sont un   essai psychologique et littéraire sur les effets du haschich et de l’opium

Mais Baudelaire croule sous les dettes et part en Belgique pour y donner des conférences. Dans un premier temps plein d’espoir pour ce nouveau départ, il est vite déçu par cette expérience. Baudelaire séjournera en Belgique de 1864 à 1866, date à laquelle le poète commence à avoir de sérieux problèmes de santé des suites de la syphilis, de l’abus d’alcool et autres drogues. (perte de la parole…).   Soigné d’abord par Malassis, il est ramené à Paris en juillet 1866 et placé dans une maison de santé, où son agonie se prolonge plusieurs mois encore ; la mort vient enfin le délivrer du supplice de voir, de comprendre, et de ne pouvoir rien exprimer. Il a 46 ans.

En 1869 sont publiés à titre posthume,  Le Spleen de Paris (recueil de poèmes en prose) et les Curiosités esthétiques.

Le sous-titre  Le Spleen de Paris  informe sur la source de l’inspiration poétique, ce que confirme une lettre que Baudelaire adressait à Victor Hugo :  ” […] J’ai essayé d’enfermer là-dedans toute l’amertume et toute la mauvaise humeur dont je suis plein”.

Le terme  “spleen”   fait directement référence à la première partie des   Fleurs du Mal   (  ” Spleen et Idéal”) , et “de Paris” semble faire écho à la deuxième partie du recueil en vers :   ” Tableaux parisiens”.

 Composé de  50 pièces   dont une quarantaine ont été publiées dans des journaux et revues du vivant de Baudelaire

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Grande diversité thématique (plus que dans les fleurs du mal)même si l’on retrouve beaucoup de points communs

  • le portrait du poète (lire le Confiteor de l’artiste) 
  • L’évasion : le rêve, le voyage, l’ivresse
  • la femme, l’amour
  • les déshérités 
  • la ville, la foule

IV. L'OEUVRE POETIQUE de Baudelaire

Son œuvre poétique est une révolution.

1857 , année des Fleurs du Mal, inaugure un bouleversement poétique.

Au cours des années et des siècles qui suivront, la création poétique sera influencée par l’œuvre baudelairienne :

• Les premiers poèmes de Mallarmé sont baudelairiens

• Rimbaud le salue comme le premier et le seul « voyant »

• Les symbolistes le désigne comme le véritable précurseur

• Verlaine voit en lui le 1er des « poètes maudits ».  

Il annonce même ce qui succèdera au symbolisme. Ainsi avec Tableaux parisiens (et des poèmes en prose) Baudelaire influence la réaction réaliste et moderniste contre le symbolisme.

• Le surréalisme se réclamera aussi de Baudelaire

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En 1955, Yves Bonnefoy, grand poète contemporain écrit dans sa préface aux Fleurs du mal : « Voici le maitre livre de notre poésie ».

Paul Valery () lui rend un très bel hommage : « Ni Verlaine, ni Mallarmé, ni Rimbaud n’eussent été ce qu’ils furent sans la lecture qu’ils firent des Fleurs du Mal à l’âge décisif »

Baudelaire : vision de l'homme

A. L’homme tiraillé entre Dieu et Diable…

Le déchirement de la condition humaine.

Pour Baudelaire, « il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l’une vers Dieu, l’autre vers Satan. L’invocation vers Dieu est désir de monter en grade ; celle de Satan ou animalité est une joie de descendre » Mon Cœur mis à nu.

C’est une vision pascalienne de l’homme, écartelé entre sa spiritualité et son animalité. Baudelaire est un poète profondément tragique.  

  Pascal est un philosophe du XVII° qui juge la condition humaine mis é rable sans le secours de Dieu : « Qu’est-ce donc que nous crient cette avidit é et cette impuissance, sinon qu’il y eu autrefois dans l’homme un v é ritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide, et qu’il essaye inutilement de remplir de tout ce qui l’environne, recherchant des choses absentes le secours qu’il n’obtient pas des pr é sentes, mais qui en sont toutes incapables, parce que le gouffre infini ne peut ê tre rempli que par un objet infini et immuable, c’est- à -dire par Dieu lui-m ê me ?». Pour Pascal, nous nous nous divertissons pour é viter de nous retrouver face au n é ant de notre condition .  

Pour lui, le Mal est   inhérent à la condition humaine et il est un thème récurrent de son oeuvre.

Dans le poème liminaire Au lecteur ,   l’auteur nous avertit  :

C’est le Diable qui tient les fils qui nous remuent ! Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;

Les poètes romantiques ont ressuscité Satan, un Satan gentil… Mais le Satan de Baudelaire est le Satan méchant des Écritures.  

L'homme tiraillé entre Spleen et Idéal

Le poète des Fleurs du mal est tiraillé entre Spleen et Idéal.

Le mot existe déjà au   XVIIIe siècle : Diderot l’évoque dans une lettre   1760 (« le spline ou les vapeurs anglaises »), tout en reconnaissant en ignorer le sens. Le mot anglais remonte au XIVe siècle, où il désignait la rate, siège de la bile noire que l’on croyait responsable de la mélancolie. En l’empruntant à une langue étrangère (qu’il connaissait pourtant bien, puisque c’est la langue d’Edgar Poe, son double en poésie), Baudelaire entend souligner l’étrangeté de cet état qui s’abat comme une malédiction sur l’esprit et le laisse désemparé.   

Le Spleen, c’est l’Ennui . Un Ennui métaphysique. Celui qui est personnifié dans le poème « Au  lecteur » qui sert de préface.

(…) Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,

Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,

Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,

Dans la ménagerie infâme de nos vices,

Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !

Quoiqu’il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,

Il ferait volontiers de la terre un débris

Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C’est l’Ennui ! – l’oeil chargé d’un pleur involontaire,

Il rêve d’échafauds en fumant son houka.

Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,

– Hypocrite lecteur, – mon semblable, – mon frère !

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L’ennui est la marque sur l’homme moderne, du péché origine l : si l’homme est mélancolique, c’est parce qu’il se souvient de la chute*.

Le spleen, c’est l’angoisse face à cet Ennui , face au temps, à la solitude, à l’impossibilité à trouver un sens….

Baudelaire dans une lettre à sa mère de 1857, définit ainsi le spleen :  

« Ce que je sens, c’est un immense découragement, une sensation d’isolement insupportable, une peur perpétuelle d’un malheur vrai, une défiance complète de mes forces, une absence totale de désir, une impossibilité de trouver un amusement quelconque… Je me demande sans cesse à quoi bon ceci ? À quoi bon cela ? C’est là le véritable esprit de spleen… »

Enfin, le spleen c’est aussi le sentiment d’horreur d’être enfermé à l’intérieur de ce monde fini, matériel. Sorte de claustrophobie existentielle très visible dans Spleen IV. L’idéal et l’infini restent alors désespérément inatteignables.

Comment être poète dans un monde sans idéal? C’est la dissolution de l’idéal,   qui plonge le poète dans un abîme d’ennui, qui est la conscience de l’infinie , de la mort au travail dans le tic tac de l’horloge, dans la chute de chaque seconde, et qui est désormais un gouffre dont aucun dieu ne peut nous sauver, qu’aucune promesse de résurrection ne peut vaincre.

Cette angoisse infinie, qui est à la fois l’effroi de l’abandon et le sentiment de l’absurde, Baudelaire le nomme d’un mot anglais : le spleen. Il s’agit d’un état proprement moderne, une passion du néant que jamais l’esprit n’avait souffert avec autant d’intensité, pour lequel il faut un mot moderne, emprunté à la langue du pays qui incarne alors le mieux le matérialisme de la modernité  

Parce que ce spleen   est encore la peste moderne qui nous vient d’Amérique, le règne de l’argent et le mépris de l’idéal nous « américanisent  » (Baudelaire est l’un des premiers à employer ce verbe)  

Dans les  Fleurs du Mal, quatre poèmes successifs, intitulés « Spleen », sont consacrés à ce mal qui accable l’âme du poète (n° 75 à 78). Seul l’idéal peut nous sauver du spleen et l’esprit sans idéal est condamné au vertige du spleen. Tel un Don Quichotte désespéré, le poète est en « révolte » contre un monde qui ne veut plus de lui, qui se détourne de l’idéal , et le poète lui préfère le rêve :                            Certes je sortirai quant à moi satisfait                              D’un monde où l’action n’est pas la sœur du rêve 

Le reniement de saint Pierre   

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L’Idéal, sans lequel l’homme tombe vertigineusement dans le gouffre du spleen, naît de l’imagination et du rêve.

L’Idéal c’est la capacité à sentir la Beauté et comprendre le monde invisible des choses spirituelles dont le monde visible n’est que le reflet. On retrouve ici la vision platonicienne et l’opposition au monde sensible/monde intelligible.

Baudelaire reprend   les idées du philosophe grec Platon : (cf. le mythe de la caverne), les apparences du monde sensible, autrement dit la réalité qui nous entoure, ne seraient que le reflet, la pâle copie d’un monde invisible qui nous est inaccessible, une sorte d’au-delà idéal, où tout atteindrait sa perfection, sa parfaite essence : beauté, amour…

Plus   globalement le terme idéal englobe chez Baudelaire t out ce qui est divin, parfait pur, par opposition au monde matériel corrompu par le mal, dévoré par l’Ennui.

Le terme d’Idéal désigne donc ce monde invisible, inaccessible certes, mais que le poète est parfois capable d’entrevoir, dans les méandres de sa mémoire, dans son imagination, dans un ailleurs exotique, dans une femme, dans un parfum, une chevelure…

Baudelaire redéfinit la poésie et pour lui « l’imagination seule contient la poésie » ; elle est « la reine des facultés » . Mais pour lui, l’imagination n’est pas instinctive, sauvage. Elle est une conscience, le travail de toutes les forces de l’esprit . Elle consiste à composer cet univers qui nous parvient comme incohérent, elle consiste à …ordonner la nature.

L’imagination ordonne la nature selon des règles, des liaisons que seul le poète est capable de voir. Il est un « traducteur », un « déchiffreur de l’universelle analogie » . Il est l’inventeur des métaphores mais les métaphores sont « exactes » ; elles rapprochent ce qui doit être rapproché, elles sont des révélations. Et ce sont les Correspondances …

La Nature est un temple où de vivants piliers

Laissent parfois sortir de confuses paroles ;

L’homme y passe à travers des forêts de symboles

Qui l’observent avec des regards familiers »

Les correspondances

Les correspondances jouent sur deux plans :

a) Les correspondances horizontales (Synesthésie)

Analogie entre les sensations

C’est l’idée que le monde qui nous entoure , malgré son apparent désordre et son chaos, possèderait une profonde unité. Ces correspondances horizontales se traduisent concrètement chez Baudelaire par l e mélange des sensations qui semblent se fondre, fusionner entre elles : « les parfums, les couleurs et les sons se répondent… » (cf. le poème Correspondances) ,Ce sont les synesthésies

Cela est possible parce qu’il y a correspondance du sensible au spirituel. Les correspondances révèlent le monde comme unité.

b) Les correspondances verticales

Pour Baudelaire, la réalité qui l’entoure est composée de « symboles » que seul le poète peut déchiffrer e t qui lui permettent d’entrevoir le monde invisible et immatériel de l’Idéal. Il existerait ainsi une communication secrète entre le monde matériel visible et le monde invisible de L’idéal, ce sont les correspondances verticales. (en quelque sorte vers le monde intelligible) Voir les Fonctions de la poésie

Ce qui n’empêche pas Baudelaire d’être le poète de la modernité : « celui-là seul sera le peintre, le vrai peintre, qui saura arracher à la vie actuelle son côté épique ».  

La poésie de Baudelaire ne se sépare jamais de l’expérience vécu e. Il est avant tout un être de sensualité et la vie seule donne la sensation. S’il cherche un ailleurs, donc l’évasion ce n’est pas parce que la vie n’a pour lui aucune couleur, aucun son, c’est qu’elle le déçoit parce qu’il en espère énormément. C’est le monde de l’ici et maintenant qui le passionne, qui fait battre son coeur avec violence. Et c’est sans doute pour cela qu’il nous bouleverse encore. Les Fleurs du Mal sont avant tout le livre d’une confession, d’un coeur mis à nu . Et il le dit lui-même: « faut-il vous dire, à vous qui ne l’avait pas plus deviné que les autres, que dans ce livre atroce, j’ai mis tout mon coeur, toute ma tendresse, toute ma religion (travestie), toute ma haine ? »

Podcast France inter : Baudelaire et Les Fleurs du Mal

Et…Un été avec Baudelaire

Qu'est-ce que l'acte poétique pour Baudelaire ?

  Le poète   et la poésie selon Baudelaire :

Les Fleurs du mal s’ouvre sur le poème B énédiction   : le poète y apparaît comme un élu qui vient au monde par « un décret des puissances suprêmes » . Le Poète   accepte la souffrance comme « un divin remède à nos impuretés » et Dieu destine au poète une place de choix dans son paradis.  

Le poète, c’est aussi celui qui « comprend sans effort/le langage des fleurs et des choses muette s » , et donc aussi un initié capable de déchiffrer langage des choses et de le traduire au reste de l’humanité.

Mais il est aussi une victime de la cruauté humaine, un exilé comme dans l’albatros.

Prisonnier   de la banalité, confiné dans la résignation universelle, l e poète rêve d’un ailleurs impossible et étouffe dans le cachot qu’est ce monde.

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Baudelaire, l'alchimiste

Baudelaire considère que c’est au poète d’apporter à la vie grandeur et beauté.  

Symboliquement, l’alchimie consiste à rendre au monde matériel sa perfection perdu en y faisant resplendir la beauté et la spiritualité.  

Au Moyen Âge on a accordée aux alchimistes le pouvoir de transformer les métaux vils comme le plomb, en or symbole de perfection que l’on croyait produit par le soleil.

Baudelaire veut lui aussi extraire la beauté du mal. Et le mal ici, c’est le péché et la souffrance. C’est pourquoi il écrit dans L’Ébauche d’un épilogue pour la deuxième édition des  Fleurs du Mal   (1861)

Ô vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or.   

On peut aussi prendre cette expression de façon plus littérale : la boue, c’est la boue de Paris, bien réelle, que le poète va transmuer en œuvre d’art.

En même temps Baudelaire se dit « le plus triste des alchimistes »

Dans Alchimie de la douleur , Baudelaire se plaint d’être inspiré par un « Hermès inconnu » qui lui fait faire exactement le contraire de ce que faisaient les alchimistes :

Par toi je change l’or en fer

Et le paradis en enfer

Alors, à quoi sert le poète ?

Dans le poème préliminaire « Au lecteur   » , il se donne comme fonction de donner à voir au lecteur, dans un sinistre miroir, l’horreur de la vie, le spleen et le mal que chacun porte en soi  :  

Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère…

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Baudelaire considère que la poésie  «n’a pas la Vérité pour objet, elle n’a qu’Elle-même »

Mais elle n’est pas pour autant un discours clos sur lui-même.  

De plus, elle n’a rien à voir avec la morale  ; le Vrai, le Beau et le Bien ne communiquent pas : chacun à son domaine et pour lui c’est une erreur de penser que le beau est en lien avec le bien.  

Il utilise d’ailleurs plusieurs symboles pour définir la beauté  :  

Elle est un sphinx dans le poème La Beauté , monument de pierre, froid, qui dédaigne les hommes.   C’est une beauté parfaite proche de l’idéal grec. Lointaine, cruelle…

Dans Hymne à la beaut é, elle est à la fois ange et démon.   Elle est personnifiée par une femme qui « gouverne tout », elle est au-dessus de la morale. La beauté est ici comme l’ivresse, une tentative pour échapper au spleen « Que tu viennes du ciel ou de l’enfer, qu’importe ? » . C’était un opium divin dans Les Phares , ici elle est à la fois divine et infernale.

Donc un objet considéré comme immoral peut-être beau. Comment ? Par l’alchimie du verbe, justement. 

C’est donc le langage poétique qui conduit l’homme vers la perception du Beau.

Mais le beau est défini chez lui d’une façon radicalement neuve  : le beau pour Baudelaire « est toujours bizarre », « C’est son immatriculation, sa caractéristique » in Curiosités esthétiques (1868) . Aussi, l’enseignement du beau est une hérésie, pour lui on ne peut pas   l’enseigner et le bizarre est nécessaire au beau, s’intègre en lui. Cf la beauté atypique de Jeanne Duval

Pour lui, la seule réponse au Mal, c’est la Beauté . « Extraire la beauté du Mal » , tel est l’objet de son travail poétique, d’où le titre oxymorique des Fleurs du Mal.

Et « C’est cet admirable, cet immortel instinct du Beau qui nous fait considérer la terre et ses spectacles comme un aperçu, comme une correspondance du Ciel. »

« C’est à la fois par la poésie et à travers la poésie, par et à travers la musique que l’âme entrevoit les splendeurs situées derrière le tombeau »

Pour lui, la poésie est le lieu où s’exprime « le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont l’autre côté est l’éternel et l’immuable »

La fonction de la poésie sera donc de combler « l’aspiration humaine vers une beauté supérieure ».   La poésie retrouve alors une fonction morale indirecte alors même qu’elle ne poursuit pas ce but. 

Toutefois l’expérience esthétique, comme l’amour, ne permet pas, ou bien rarement,   d’atteindre à l’idéal de perfection…et le spleen   n’est pas nécessairement vaincu.

S’il est possible de sauver encore la poésie, alors il faudra chercher le vestige de la beauté dans la laideur du monde moderne. Et si le Mal est tout ce qui nous reste après la ruine de l’idéal et la chute des anges, alors c’est dans le Mal que le poète doit cueillir les fleurs nouvelles de la modernité. « Il faut être absolument moderne »  écrira Rimbaud dans  Une saison en enfer  (1873 ). En choisissant, non de se détourner de la modernité, mais de l’approfondir au contraire pour trouver, au sein de sa laideur, une beauté nouvelle, et de l’or dans sa boue, le projet baudelairien devient unique et sans précédent  

dissertation sur la boue et l'or

Baudelaire et l’esthétique de la boue

LES FLEURS DU MAL

Le titre est fondé sur un oxymore:

Fleurs : connote l’idée de beauté

Mal : idée de souffrance, de douleur, de pêché.

Mais la préposition « de » indique lien de dépendance entre ces deux termes : Les fleurs sortent du mal : les fleurs sont la beauté que l’on extrait du mal.

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Structure du recueil

C’est la recherche de l’Idéal, qui seul permettra d’échapper au Spleen,  car tout être porte en lui le désir de bonheur absolu. Mais c’est toujours l’angoisse qui gagne.

Et la structure même du recueil montre ce combat et son échec.

En effet, le recueil est formé de 6 parties :

  • Spleen et Idéal ;
  • Tableaux parisiens (section initialement absente) ;
  • Fleurs du Mal ;

  « Bénédiction »   ouvre le recueil, puis Baudelaire  exprime l’art et l’amour.

a) Le cycle de l’art

De Bénédiction à Hymne à la Beauté.

Vision de la nature selon les correspondances , retour à un paradis qui est celui de l’homme avant la chute  …

b) le cycle de l’amour

De Parfum exotique à Sonnet d’automne .

L’art se mêle à l’amour mais le salut du poète est plus assuré par l’art que par l’amour. Car l’amour ne peut vaincre la mort sans la force de l’art. C’est le thème d’Une Charogne  : la beauté mourra et le poète gardera la forme et l’essence divines de ses amours décomposées…

Sur une route, le poète et sa belle découvre un cadavre de femme en putréfaction…

Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,

A cette horrible infection,

Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,

Vous, mon ange et ma passion !

II.   Spleen  :

Etouffement humain, horreur d’être soi-même ; complaisance de l’homme envers son propre malheur, évasion impossible…

a) Tableaux parisiens

 La ville est une vaste allégorie du malheur d’être homme :

Le poète va alors chercher des évasions véritables…

« Paris change ! Mais rien dans ma mélancolie N’a bougé : palais neufs, échafaudages, blocs, Vieux faubourgs, tout pour moi devient allégorie, Et mes chers souvenirs sont plus lourds que des rocs ».

C’est la tentation des paradis artificiels , la volonté de retrouver « cette belle saison, ces heureuses journées, ces délicieuses minutes » qui disent parfois la possibilité du bonheur. Mais après l’ivresse et le songe, il y a le réveil…

C’est alors le cycle du vice. Le plus sombre du livre.

c) Les Fleurs du Mal

Plus de lumières mais seulement les ténèbres du Mal .  La condition humaine apparaît sans voile .C’est par la révolte que le poète   choisit de l’assumer.

Blasphème, religion travestie, option pour Satan contre Dieu… Tels sont les thèmes de cette partie. Mais la révolte c’est l’exaspération du mal et non sa rémission. Où trouver alors le repos ? Dans la mort…

La mort n’est plus ici symbole de notre malheur mais plutôt l’espoir de la vie.  

La mort pour Baudelaire, c’est l’inconnu et c’est la seule terre vers laquelle le voyageur revenu de tous les voyages peut encore s’embarquer car il est du moins assurer qu’elle sera autre que les terres de son ennui. Ainsi écrit-il à la fin du poème Le Voyage  qui clôt le recueil :

« Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu’importe   ?

Au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau ! »

Les Fleurs du Mal expriment le  conflit incessant entre l’Idéal et le Spleen . Il y a chez Baudelaire et il le dit lui-même   , “…dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l’une vers Dieu, l’autre vers Satan.  L’invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre”.

Journaux intimes (1887), Mon coeur mis à nu

La forme : Baudelaire se place du côté d’ un certain classicisme formel . L’usage de l’alexandrin et du sonnet reste majoritaire chez lui.

Rimbaud reprochera à Baudelaire de n’avoir pas vu que “les inventions d’inconnu réclament des formes nouvelles.”

V. BAUDELAIRE & L'IMAGE

Vii. lectures lineaires (fleurs du mal).

Rappelez-vous l’objet que nous vîmes, mon âme, Ce beau matin d’été si doux : Au détour d’un sentier une charogne infâme Sur un lit semé de cailloux, Les jambes en l’air, comme une femme lubrique, Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d’une façon nonchalante et cynique Son ventre plein d’exhalaisons. Le soleil rayonnait sur cette pourriture, Comme afin de la cuire à point, Et de rendre au centuple à la grande Nature Tout ce qu’ensemble elle avait joint ; Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s’épanouir. La puanteur était si forte, que sur l’herbe Vous crûtes vous évanouir. Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride, D’où sortaient de noirs bataillons De larves, qui coulaient comme un épais liquide Le long de ces vivants haillons. Tout cela descendait, montait comme une vague, Ou s’élançait en pétillant ; On eût dit que le corps, enflé d’un souffle vague, Vivait en se multipliant. Et ce monde rendait une étrange musique, Comme l’eau courante et le vent, Ou le grain qu’un vanneur d’un mouvement rythmique Agite et tourne dans son van. Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve, Une ébauche lente à venir, Sur la toile oubliée, et que l’artiste achève Seulement par le souvenir. Derrière les rochers une chienne inquiète Nous regardait d’un oeil fâché, Epiant le moment de reprendre au squelette Le morceau qu’elle avait lâché. – Et pourtant vous serez semblable à cette ordure, A cette horrible infection, Etoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion ! Oui ! telle vous serez, ô la reine des grâces, Après les derniers sacrements, Quand vous irez, sous l’herbe et les floraisons grasses, Moisir parmi les ossements. Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine Qui vous mangera de baisers, Que j’ai gardé la forme et l’essence divine De mes amours décomposés !

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle  Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,  Et que de l’horizon embrassant tout le cercle  Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits;

Quand la terre est changée en un cachot humide,  Où l’Espérance, comme une chauve-souris,  S’en va battant les murs de son aile timide  Et se cognant la tête à des plafonds pourris;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées  D’une vaste prison imite les barreaux,  Et qu’un peuple muet d’infâmes araignées  Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie  Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,  Ainsi que des esprits errants et sans patrie  Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

– Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,  Défilent lentement dans mon âme; l’Espoir,  Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,  Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

Le vin sait revêtir le plus sordide bouge  D’un luxe miraculeux, Et fait surgir plus d’un portique fabuleux Dans l’or de sa vapeur rouge, Comme un soleil couchant dans un ciel nébuleux. L’opium agrandit ce qui n’a pas de bornes,  Allonge l’illimité, Approfondit le temps, creuse la volupté,  Et de plaisirs noirs et mornes Remplit l’âme au delà de sa capacité. Tout cela ne vaut pas le poison qui découle  De tes yeux, de tes yeux verts,  Lacs où mon âme tremble et se voit à l’envers…  Mes songes viennent en foule Pour se désaltérer à ces gouffres amers. Tout cela ne vaut pas le terrible prodige  De ta salive qui mord, Qui plonge dans l’oubli mon âme sans remord,  Et, charriant le vertige, La roule défaillante aux rives de la mort !

Corrections des lectures linéaires

VIII. LECTURES LINEAIRES (complémentaires)

La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres. Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D’être parmi l’écume inconnue et les cieux ! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son enfant. Je partirai ! Steamer balançant ta mâture, Lève l’ancre pour une exotique nature !

Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs ! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages, Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots … Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !

Je vous envoie un bouquet que ma main Vient de trier de ces fleurs épanies 1  ; Qui ne les eût à ce vêpre 2 cueillies Chutes à terre elles fussent demain. Cela vous soit un exemple certain Que vos beautés, bien qu’elles soient fleuries En peu de temps cherront toutes flétries Et, comme fleurs, périront tout soudain. Le temps s’en va, le temps s’en va, ma Dame, Las ! le temps, non, mais nous nous en allons, Et tôt serons étendus sous la lame 3  ; Et des amours desquelles nous parlons, Quand serons morts, n’en sera plus nouvelle : Pour ce aimez-moi, cependant qu’êtes belle 4 . Pierre de Ronsard – Continuation des Amours

Comme d’un cercueil vert en fer blanc, une tête De femme à cheveux bruns fortement pommadés D’une vieille baignoire émerge, lente et bête, Avec des déficits assez mal ravaudés ; Puis le col gras et gris, les larges omoplates Qui saillent ; le dos court qui rentre et qui ressort ; Puis les rondeurs des reins semblent prendre l’essor ; La graisse sous la peau paraît en feuilles plates ; L’échine est un peu rouge, et le tout sent un goût Horrible étrangement ; on remarque surtout Des singularités qu’il faut voir à la loupe… Les reins portent deux mots gravés : Clara Venus ; – Et tout ce corps remue et tend sa large croupe Belle hideusement d’un ulcère à l’anus.

Corrections des lectures linéaires complémentaires.

IX. DOCS. COMPLEMENTAIRES

Le scarabée est un insecte qui se nourrit des excréments d’animaux autrement plus gros que lui. Les intestins de ces animaux ont cru tirer tout ce qu’il y avait à tirer de la nourriture ingurgitée par l’animal. Pourtant, le scarabée trouve, à l’intérieur de ce qui a été rejeté, la nourriture nécessaire à sa survie grâce à un système intestinal dont la précision, la finesse et une incroyable sensibilité surpassent celles de n’importe quel mammifère. De ces excréments dont il se nourrit, le scarabée tire la substance appropriée à la production de cette carapace si magnifique qu’on lui connaît et qui émeut notre regard : le vert jade du scarabée de Chine, le rouge pourpre du scarabée d’Afrique, le noir de jais du scarabée d’Europe et le trésor du scarabée d’or, mythique entre tous, introuvable, mystère des mystères.

Un artiste est un scarabée qui trouve, dans les excréments mêmes de la société, les aliments nécessaires pour produire les oeuvres qui fascinent et bouleversent ses semblables. L’artiste, tel

un scarabée, se nourrit de la merde du monde pour lequel il oeuvre, et de cette nourriture abjecte il parvient, parfois, à faire jaillir la beauté.

Mouawad e x p l i q u e d’abord le processus par lequel l e scarabée fabrique sa carapace à partir d’excréments…

Cet étrange procédé aboutit à produire du « beau »…

On retrouve évidemment ici le « j’ai pris ta boue et j’en ai fait de l’or » baudelairien mais aussi, ce qui se passe avec la plupart des textes de cette année : on part du mal pour aboutir à une oeuvre esthétique, souvent atemporelle, capable de résonner en chacun de nous.

On pensera aussi à Boileau qui conseille de toucher le coeur, l’émotion par la beauté du texte :

« Il n’est point de serpent, ni de monstre odieux.

Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux :

D’un pinceau délicat l’artifice agréable

Du plus affreux objet fait un objet aimable ».

 Rimbaud, Lettre à Paul Demeny

  L’essentiel sur Rimbaud et la lettre du voyant 

et lien avec  Le Bateau ivr e

  L’œuvre poétique de Rimbaud a bouleversé la poésie. Pourtant, c’est  une oeuvre écrite en cinq- six ans, (entre 15 et 20 ans) , puis il se tait à jamais. A 20 ans, il a déjà tout écrit… L’homme « aux semelles de vent » ( selon l’expression de Verlaine), ne cesse alors de voyager,  et part faire fortune en Abyssinie. Paul Verlaine résume ainsi la vie de Rimbaud   :  « … il ne fit plus rien que de voyager terriblement et de mourir très jeune ».( 37 ans)D’abord admirateur des Parnassiens et même des romantiques, il les rejettera ensuite, « écoeuré » par leur lyrisme. Il veut et va renouveler totalement la création poétique. 

Dans sa lettre du 15 mai 1871 à Paul Demeny, Rimbaud expose son programme poétique :  “Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant. Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens” . Ainsi,  “il arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues” .Si pour les romantiques le moi créateur est aussi le moi du poète, pour Rimbaud… «  Je est un autre » . C’est à dire que pour lui, la création poétique n’a rien à faire avec l’expérience personnelle (sauf dans les poèmes de prime jeunesse comme  Roman  et encore … ). Le moi du poète est donc un autre moi, impersonnel. C’est pourquoi le  poète doit   « être voyant, se faire voyant » pour   « arrive(r) à l’inconnu! ». Ce que cherche à atteindre Rimbaud, c’est donc cet inconnu. Et la poésie naitra de la torture infligée au moi conscient. C’est pourquoi le voyant devient  « le grand malade, le grand criminel, le grand maudit »  et  « le Suprême Savant!  »,   « car il arrive à l’inconnu » .  Et il y arrive par  le langage .Il faut, dit Rimbaud  « trouver une langue »  qui résumera tout  « parfums, couleurs, sons » .

Le poète est aussi un  « voleur de feu »  un Prométhée, et sa fonction est de    donner à l’humanité  « de nouvelles formes de langage »  –, qu’il aura été chercher  « là-bas »  dans l’inconnu. C’est ça la poésie pour Rimbaud.  L’écriture de Rimbaud est l’expérience des limites…  

Arthur Rimbaud, Le bateau ivre

  • 1. Rimbaud, Le Bateau ivre

Rimbaud, Le Bateau ivre, Poésies, 1871 ( Rimbaud a 17 ans)

     Le Bateau ivre  illustre parfaitement le projet rimbaldien.   

Comme je descendais des Fleuves impassibles, 

Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :

Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,

Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J’étais insoucieux de tous les équipages,

Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.

Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,

Les Fleuves m’ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,

Moi, l’autre hiver, plus sourd que les cerveaux d’enfants,

Je courus ! Et les Péninsules démarrées

N’ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.

Plus léger qu’un bouchon j’ai dansé sur les flots

Qu’on appelle rouleurs éternels de victimes,

Dix nuits, sans regretter l’oeil niais des falots !

Plus douce qu’aux enfants la chair des pommes sûres,

L’eau verte pénétra ma coque de sapin

Et des taches de vins bleus et des vomissures

Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème

De la Mer, infusé d’astres, et lactescent,

Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême

Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires

Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,

Plus fortes que l’alcool, plus vastes que nos lyres,

Fermentent les rousseurs amères de l’amour !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes

Et les ressacs et les courants : je sais le soir,

L’Aube exaltée ainsi qu’un peuple de colombes,

Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir !

J’ai vu le soleil bas, taché d’horreurs mystiques,

Illuminant de longs figements violets,

Pareils à des acteurs de drames très antiques

Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

J’ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,

Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,

La circulation des sèves inouïes,

Et l’éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

J’ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries

Hystériques, la houle à l’assaut des récifs,

Sans songer que les pieds lumineux des Maries

Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

J’ai heurté, savez-vous, d’incroyables Florides

Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux

D’hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides

Sous l’horizon des mers, à de glauques troupeaux !

J’ai vu fermenter les marais énormes, nasses

Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !

Des écroulements d’eaux au milieu des bonaces,

Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d’argent, flots nacreux, cieux de braises !

Échouages hideux au fond des golfes bruns

Où les serpents géants dévorés des punaises

Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

J’aurais voulu montrer aux enfants ces dorades

Du flot bleu, ces poissons d’or, ces poissons chantants.

– Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades

Et d’ineffables vents m’ont ailé par instants.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,

La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux

Montait vers moi ses fleurs d’ombre aux ventouses jaunes

Et je restais, ainsi qu’une femme à genoux…

Presque île, ballottant sur mes bords les querelles

Et les fientes d’oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds.

Et je voguais, lorsqu’à travers mes liens frêles

Des noyés descendaient dormir, à reculons !

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,

Jeté par l’ouragan dans l’éther sans oiseau,

Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses

N’auraient pas repêché la carcasse ivre d’eau ;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,

Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur

Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,

Des lichens de soleil et des morves d’azur ;

Qui courais, taché de lunules électriques,

Planche folle, escorté des hippocampes noirs,

Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques

Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues

Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,

Fileur éternel des immobilités bleues,

Je regrette l’Europe aux anciens parapets !

J’ai vu des archipels sidéraux ! et des îles

Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :

– Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t’exiles,

Million d’oiseaux d’or, ô future Vigueur ?

Mais, vrai, j’ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.

Toute lune est atroce et tout soleil amer :

L’âcre amour m’a gonflé de torpeurs enivrantes.

Ô que ma quille éclate ! Ô que j’aille à la mer !

Si je désire une eau d’Europe, c’est la flache

Noire et froide où vers le crépuscule embaumé

Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche

Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,

Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,

Ni traverser l’orgueil des drapeaux et des flammes,

Ni nager sous les yeux horribles des pontons.

   Le Bateau ivre  illustre parfaitement le projet rimbaldien.   

Les cinq premières strophes :

Elles racontent comment un d bateau rompt ses amarres : c’est le poète rompant avec les normes e la poésie, les conventions de la morale, l’idéologie dominante de la société. Il faut le lire comme un parallèle   entre le récit d’un voyage maritime et d’un voyage en poésie. Voyage effectué par un adolescent.

Les expériences du bateau ce sont celles de Rimbaud .

Les « haleurs » du navire sont pour Rimbaud les traditions poétiques qu’il abandonne, les conventions qu’il lâche. Les liens se font par les métaphores.  

Quant aux fleuves impassibles , ils sont l’équivalent de la société du XIX° que rejette Rimbaud qui la trouve stérile, figée,  étouffante…  

Le massacre des haleurs , c’est l’image de cette séparation avec le monde d’avant. Rimbaud le rebelle va, comme le navire « descendre » où il veut … peut-être…où en Enfer.. Après la séparation avec la société du XIX°/ fleuve paisible vient le temps de la liberté illustré par l’univers marin agité  ce ,”tohu-bohu”.

Le bateau « fugue » comme le poète. Peu lui importe les dangers, seule compte l’euphorie de la liberté…  

Les strophes 6 à 17  

Elles évoquent les aventures maritimes étourdissantes de l’épave à la dérive : c’est le poète arrivant “à l’inconnu” . Le monde et la poésie ne font qu’un. Les sens sont surpuissants et s’emparent de tout. “J’ai vu »  affirme la certitude de ses visions. “Je sais”. La vraie vie est “ailleurs”, dans la vérité absolue des délires de l’imaginaire , dans cet autre monde recréé par l’alchimie du verbe (du mot), monde de “neiges éblouies”, de “sèves inouïes”.  

C’est par le langage que  Rimbaud cherche à réinventer le monde. Toutes les ressources du langage poétique sont mises à contribution pour entraîner le lecteur dans cette fête des sens et lui donner l’impression du nouveau : jeux de sonorités, rythmes berceurs, couleurs crues, associations de mots inattendues, mots rares ou inventés, effets synesthésiques, métaphores insolites. Métaphores, visions se succèdent, s’entrechoquent et s’expriment à travers les sonorités, les hyperboles. La syntaxe réunit paysages, hommes, objets,  bêtes.. .   Le poète voyant – pour dire le monde, les visions- a besoin d’une nouvelle langue, qu’il invente. La fascination du poète pour l’aventure, fût-ce au prix du naufrage et de la mort. Car c’est bien de Rimbaud qu’il s’agit à travers le « bateau ivre ». C’est d’ailleurs ce qui lui arrivera…

     Mais il y a danger a ainsi quitter l’ici pour l’ailleurs.

Les strophes 18 à 25:  

Elles disent l’épuisement du poète et sa nostalgie du vieux monde : c’est le moment où, “affolé”, le “voyant” doit se résigner à “crever” (“dans son bondissement par les choses inouïes et innombrables”, comme dit la lettre), abandonner ses visions avec la consolation de les avoir vues. Et l’on passe  du poète-bateau au poète égaré, assourdi par les oiseaux “criards” .

Le  désenchantement  pousse à renier la révolte, à désirer le retour au sein de l’univers familier de la société stérile…  L’aventure a mené au désespoir  Il est temps de revenir  à l’abri  derrière les “anciens parapets” .    L’euphorie, le sentiment de liberté,  la jouissance que ressent le voyant  s’effacent devant l’amertume. I l a vu oui- mais n’a rien conquis.    C’est encore un échec.  D ésenchanté, le poète aspire au suicide. 

Les dernières strophes réduisent le désir de mers lointaines à la petite mare de l’enfance.  Nostalgie de ce temps que les mots n’ont pas permis de quitter malgré tout le pouvoir qu’on leur avait donné… Immense déception.

Et pourtant, pas question de rentrer au port. Le langage, les mots n’ont pas tenu leurs promesses. N’ont pas suffi à construire le monde du voyant    Mais impossible pour lui de revenir en arrière : “Je ne puis plus”. Sa haine, son dégout du monde ancien est trop fort.   Tout le dernier quatrain refuse ce monde ancien :   traditions,   honneurs “drapeaux et flammes”, héritages intellectuels, contraintes …  

Mais   même si les mots ne suffisent pas à changer le monde et la vie, même si l’on peut se perdre dans les mots comme on se noie dans l’océan, cette expérience est primordiale, essentielle et débouchera vers un nouvel ailleurs. Dans le poème, Rimbaud fait donc l’expérience de l’échec. Il le raconte, mais le dépasse. Il peut désormais prendre un nouveau départ. Et se faire voyant encore et plus. 

Le poème, dans sa forme est très conventionnel. La versification aussi. Rien de révolutionnaire dans la forme. L’écriture n’est pas encore libérée comme elle le sera par la suite.  Néanmoins, le jeune Rimbaud essaie, s’essaie à des métaphores, des bouleversements  sémantiques et lexicaux, mais finit par s’y perdre. Le langage ne lui a pas apporté le miracle qu’il en attendait. Par contre  cette conscience de l’échec de sa démarche débouchera sur le Rimbaud génial des Illuminations. Il lui faut aller ailleurs et plus loin. Mais même là,presque toutes ces  Illuminations  s’achèvent par l’irruption de la „réalité rugueuse à étreindre”.

Spleen de Paris, Petits poèmes en prose

X. prolongement artistique : baudelaire & delacroix.

Eugène Delacroix (1798-1863)   est considéré comme le représentant majeur du romantisme .  

Il renouvelle, avec les autres artistes de sa génération, les sujets de la peinture : il puise son inspiration dans des textes que le XIXe siècle redécouvre : La divine Comédie de Dante ( La Barque de Dante et Virgile aux Enfers, Paolo et Francesca …), les tragédies de Shakespeare ( Hamlet, Macbeth …), ainsi   que les auteurs romantiques contemporains (Goethe, Byron, Walter Scott…).  

 Avec Delacroix, la peinture n’illustre plus seulement les grands épisodes de la Bible ou la légende des héros de l’Antiquité.  

Son voyage au Maroc en 1832 s era une expérience visuelle déterminante dont témoignent les Femmes d’Alger dans leur appartement.  

L ’Orient, auquel l’époque prête tout ce qu’elle n’assume pas chez elle -barbarie, passion, sensualité débridée, est objet de fascination (orientalisme). 

dissertation sur la boue et l'or

XI. Oeuvre cursive : F. PESSOA, Bureau de Tabac, 1905

Ce que nous sommes Ne peut passer ni dans un mot ni dans un livre. Notre âme infiniment se trouve loin de nous. […] Nous sommes nos rêves de nous, des lueurs d’âme, Chacun est pour autrui rêves d’autrui rêvés.

XII. FONCTIONS DE LA POESIE

Analyser la poesie.

COMMENTS

  1. Dissertation Baudelaire. 'Tu m'as donné ta boue et j'en fait de l'or"

    Baudelaire, le poète de la boue. Dans le projet d'épilogue, deux vers avant le vers « Tu m'as donné ta boue et j'en fait de l'or », Baudelaire se compare à « un parfait chimiste » lequel effectue donc cette opération de transformation de la boue en or. À l'autre bout du recueil, dès l'adresse « Au lecteur », cette ...

  2. BAUDELAIRE DISSERTATION

    Baudelaire dissertation. Le sujet traité ci-dessous porte sur Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire dans la perspective du parcours "Alchimie poétique; la boue et l'or." Le sujet de dissertation est intégralement traité sous forme de plan détaillé. Il peut également permettre de faire une synthèse, une révision dans la perspective de la dissertation.

  3. "Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or."

    Introduction. [Citation] Quand Baudelaire, dans l'appendice aux Fleurs du mal, écrit « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or. », il développe le sens de l'oxymore du titre qu'il a choisi pour son recueil et nous ouvre son laboratoire. [Problématique] Nous verrons comment cette formule provocante permet de mieux comprendre l ...

  4. Dissertation corrigée

    Tout à l'heure, comme je traversais le boulevard, en grande hâte, et que je sautillais dans la boue, à travers ce chaos mouvant où la mort arrive au galop de tous les côtés à la fois, mon auréole, dans un mouvement brusque, a glissé de ma tête dans la fange du macadam. Je n'ai pas eu le courage de la ramasser.

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  7. PDF Alchimie poétique, Plan de dissertation Baudelaire la boue et l'or

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  8. Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire

    En 1857, il écrit dans l'esquisse d'un poème : « J'ai pétri de la boue et j'en ai fait de l'or » (« Orgueil », Les Fleurs du Mal). Puis, dans un projet d'épilogue pour la deuxième édition du recueil Les Fleurs du Mal en 1861, le poète s'adresse ainsi à Paris : « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or ».

  9. Dissertation avec corrigé sur le parcours «Alchimie poétique: la boue

    Proposition de corrigé : sujet n°2 (dissertation sur Baudelaire et le parcours « Alchimie poétique : la boue et l'or ») Le critique Benjamin Fondane écrit : « Non seulement le poète descend dans le sous-sol humain où grouille un monde de stupre et de honte, mais il prend sur lui de montrer que le sous-sol peut donner des fleurs, que ...

  10. Baudelaire, Les Fleurs du Mal

    Baudelaire, Les Fleurs du Mal. 13 juin 2019. Le programme de première nous invite à étudier Les Fleurs du Mal en suivant le parcours suivant : « alchimie poétique : la boue et l'or ». Deux références peuvent éclairer cet intitulé. D'abord, un projet d'épilogue pour la deuxième édition des Fleurs du Mal :

  11. Alchimie poétique : la boue et l'or (1re)

    Dans la boue se trouve l'or. Tout comme dans le poème « Une Charogne » tiré de « Spleen et idéal ». Baudelaire y remémore à son amante, sa beauté, à son « âme » un spectacle contrasté : « Le soleil rayonnait sur cette pourriture », « Et le ciel regardait la carcasse superbe ». Chaïm Soutine, « Carcasse de bœuf », vers 1925.

  12. Dissert Baudelaire 1

    Proposition de corrigé : sujet n° (dissertation sur Baudelaire et le parcours « Alchimie poétique : la boue et l'or ») Le critique Benjamin Fondane écrit : « Non seulement le poète descend dans le sous-sol humain où grouille un monde de stupre et de honte, mais il prend sur lui de montrer que le sous-sol peut donner des fleurs, que cheveu, boue, crasse peuvent aussi chanter.

  13. Baudelaire

    BAUDELAIRE - PARCOURS ASSOCIÉ : LA BOUE ET L'OR. PREMIÈRE APPROCHE. Jusqu'à présent, nous avons parcouru l'œuvre de Baudelaire en insistant surtout sur la thématique du spleen opposé à l'idéal. Liée à la question de la mélancolie, cette thématique nous a permis de comprendre que les Fleurs du Mal - dont le titre est un ...

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    Méthode dissertation; Contraction de texte (séries techno) Essai (séries techno) ... Auteurs pour le bac de français; Interviews d'auteurs contemporains. Contact; Voici le résultat de ta recherche la boue et l'or. Le programme du bac de français 2020. 30 juin 2020. Par Amélie Vioux. Les Fleurs du Mal, Baudelaire : résumé et analyse ...

  15. Baudelaire, La boue et l'or

    Dissertation : Baudelaire, La boue et l'or. Recherche parmi 297 000+ dissertations. Baudelaire est un poète français né a paris en 1821, il est l'un des poètes les plus connus du XIXe siècle, car il inclus la modernité comme motif poétique. Il est considéré comme un poète « maudit » car il n'est pas dans les codes de la ...

  16. Les Fleurs du Mal, Baudelaire : ️ Sujets de dissertation possibles

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  17. PDF Bilan de séquence dissertation classicolycée Baudelaire

    A. L'oppression du monde. Chez Baudelaire, la relation du poète et de la vie est conflictuelle, malheureuse. La citation donnée décrit cette relation: le poète «sait descendre dans la vie» — à la manière de l'Albatros — mais cette vie est définie comme «laideur» et «sottise». Cette vie hideuse hante les Fleurs du Mal et les ...

  18. Bac de français : dissertation, BAUDELAIRE, l'analyse du ...

    Un rappel méthodologique sur la dissertation à partir de l'analyse d'un sujet sur Charles BAUDELAIRE, "Les Fleurs du Mal", problématique "La Boue et l'Or"L'a...

  19. Poesie-baudelaire-citations

    Car j'ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or. (Projet d'épilogue à l'édition de 1861) ® Conception du poète alchimiste qui change la boue en or. 2. La sottise, l'erreur, le péché, la lésine, Occupent nos esprits et travaillent nos corps, Et nous alimentons nos aimables ...

  20. Baudelaire, Les Fleurs du mal

    Préparez et révisez les examens du Brevet au Bac avec Annabac. Consultez les annales, fiches de cours, corrigés, cours audio et vidéo de la 3e à la Terminale. Baudelaire, Les Fleurs du mal - Alchimie poétique : la boue et l'or - La poésie, du XIXe au XXIe si | Annabac

  21. L'alchimie poétique dans les Fleurs du mal de Baudelaire

    L'alchimie poétique est un thème fondamental du célèbre recueil Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire. L'idée de transformation et de sublimation, parfois corruption, transcende l'oeuvre, est une clé d'analyse primordiale pour lire ce fascinant ouvrage. Les Fleurs du Mal est le recueil le plus connu de Charles Baudelaire.

  22. ALCHIMIE POETIQUE : Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857

    En 1848 des émeutes mettent à bas le Monarchie de Juillet qui sera remplacée par la II° République (1848-1852). C'est le neveu de Napoléon Ier , Louis Napoléon qui devient Président par une élection au suffrage universel. Mais par le coup d'État du 2 décembre 1851 il s'octroie tous les pouvoirs et en 1852, proclame le Second empire qui durera jusqu'en 1870

  23. Alchimie poétique : la boue et l'or

    Je suis disponible pour donner des cours particuliers de français à distance pour les lycéens (préparation au bac de français). Pour plus d'informations, vou...